L’imposition de droit compensatoire de 220 % aux ventes d’avions de Bombardier aux États-Unis par le gouvernement américain ne présage rien de bon pour nos relations commerciales avec nos voisins du sud. Cette annonce en pleine ronde de renégociation de l’ALENA envoie un drôle de message, surtout qu’il semble que la partie américaine n’a pas déposé ses demandes.
Cette attitude des plus cavalières peut être autant une position de négociation, qu’un message clair quant à l’avenir de l’ALENA. Dans les deux cas, les conséquences pour nos échanges commerciaux avec les États-Unis vont en être affectées. Il semble que le temps du partenariat global semble fini. Il sera remplacé par des accords sectoriels où l’accès du marché américain, par secteur, sera plus dicté par notre statut de client ou de concurrent.
À vouloir donner un coup de semonce aux négociations de l’ALENA, le gouvernement américain ne pouvait pas faire mieux. Il impose un droit compensatoire plus important que demandé par Boeing, 220 % au lieu de 80%. Il le fait avec son meilleur partenaire commercial, le Canada, et dans un des secteurs névralgiques de l’économie canadienne. De plus, il impose un droit compensatoire dans un secteur d’activité qui est largement supporté par tous les pays qui ont une telle industrie.
Est-ce que le gouvernement américain vient de faire sa première demande pour le futur traité, exclure l’industrie aéronautique américaine du traité, un peu comme le Canada pour les productions agricoles sous la gestion de l’offre ? Si c’est le cas, l’on verra rapidement les États-Unis mettre en place des restrictions semblables aux autres fabricants d’avions européens, brésiliens et asiatiques. Il ne faut pas oublier que les ambitions nouvelles des Russes, Chinois et Japonais dans le domaine aéronautique sont sûrement des menaces plus importantes pour les Américains. D’où la volonté américaine de réserver son marché aéronautique intérieur (un des plus gros du monde) à ses partenaires clients et non pas à ses partenaires concurrents.
Si le gouvernement américain veut effectivement une approche plus sectorielle, quel sera l’impact pour l’agriculture canadienne? Plusieurs secteurs de l’agriculture canadienne et américaine sont très intégrés l’un à l’autre, tel le secteur du bœuf et des grains. Il serait surprenant qu’un nouvel accord de l’ALENA vienne remettre en cause la situation de ces secteurs. Dans cette approche plus sectorielle, il sera plus facile pour le Canada d’exclure les secteurs sous gestion de l’offre d’un nouvel accord, car d’une part ils ne menacent pas le marché américain et il n’y a rien à échanger, du moins pour une valeur équivalente, à moins que les industriels des deux côtés de la frontière souhaitent voir une intégration de ce secteur au niveau nord-américain. Les secteurs qui seront à surveiller sont plus les secteurs comme le porc et le secteur maraîcher où l’on pourrait voir de nouvelles règles.
Mais tout cela n’est que spéculation, ces nouveaux droits de 220 % ne sont peut-être qu’une monnaie d’échange contre quelque chose. En espérant que cela ne soit pas contre nos productions de la gestion de l’offre, le Canada serait le grand perdant.