Le nécessaire syndicalisme

En Occident, les syndicats sont très et trop souvent dénigrés. Dans les années 1980, une certaine révolution économique « néolibérale » a entrepris de privatiser maximalement les profits et les services et de déréglementer le pouvoir des banques et des entreprises. Cette révolution a été particulièrement violente aux États-Unis et au Royaume-Uni. Partout, un obstacle demeurait : les syndicats. C’est pourquoi les pouvoirs en place ont voulu les démanteler. On a aussi tenté de les détruire par les voies de la pensée et de l’idéologie, en répandant à leur sujet une réputation d’inutilité, voire de nuisance. 

Traditionnellement, le syndicat détient un pouvoir de monopole, accordé légalement, lui permettant de représenter ses membres et de négocier pour eux conditions de travail et salaires. Ils sont ainsi des facteurs de réduction des inégalités. Certaines études montrent qu’ils parviennent parfois à corriger très sérieusement les effets de mauvaises politiques de redistribution fiscale. On notera au passage que ce fait ne devrait en rien représenter une invitation à se croiser les bras dans les officines gouvernementales, et que l’amélioration des politiques de redistribution devrait être une priorité. Les syndicats ont aussi une fonction d’efficacité économique, en favorisant les communications au sein de l’entreprise.

Depuis les années 1960, principalement, le Québec a tenté de relever le défi de mettre en place un modèle conciliant économie de marché et interventionnisme de l’État dans le but de favoriser la redistribution de richesse. Les syndicats s’ajoutent au portrait comme force d’équilibre entre le capital et le travail. Communément appelé « social-démocratie », ce système prend ici le nom de « modèle québécois ». Mais ledit modèle québécois en arrache depuis plusieurs décennies. Bon nombre d’acquis ont été passés à la moulinette. Depuis l’essor de ce qu’on appelle la mondialisation, il semble qu’on ne puisse que difficilement concilier le capitalisme avec les bases du système social québécois. Les syndicats ont même perdu beaucoup de rayonnement dans l’opinion publique, même si le taux de syndicalisation reste élevé.

Faut-il sacrifier le syndicalisme ? La réponse courte est non. Ceux-ci ont encore amplement leur place. On peut ensuite se demander si le syndicalisme a sa place dans le milieu agricole. Ici, la réponse courte est oui. Dans un secteur aussi menacé par le grand capital que celui de l’agriculture, l’existence d’organisations représentant les travailleurs qui y œuvrent apparaît même être un bien maigre compromis. On n’insistera jamais, non plus, sur l’importance majeure de l’agriculture : c’est de notre alimentation qu’il s’agit. On ne peut s’en remettre, à la légère, aux « lois invisibles du marché ». Trop peu de gens ont conscience de la réalité quotidienne des agriculteurs.

Le syndicalisme agricole n’est certes pas parfait, et n’entraîne pas toujours les succès escomptés, mais son existence représente un strict minimum. Il importe par conséquent qu’on lui donne des moyens robustes pour accomplir sa mission.

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