EXCLUSIF: «Les structures répondent de moins en moins aux besoins» – Vincent Breton

Dans la foulée de l’important virage de production de porc biologique, Vincent Breton, président de l’entreprise Les Viandes du Breton (duBreton) a officialisé l’abandon de la participation des fermes de l’entreprise au programme de l’Assurance stabilisation des revenus agricoles (ASRA), un programme d’assurance de la Financière agricole du Québec qui protège les entreprises agricoles contre les fluctuations des prix du marché et des coûts de production. Il a accepté de répondre aux questions de La Vie agricole :

Yannick Patelli :     En se retirant de l’ASRA (et l’industrie du porc ayant changé ces dernières années), duBreton a-t-il pour visée aussi de se retirer de la convention collective et des plans conjoints dans le porc ?
 

Vincent Breton: Étant donné notre production de créneaux, nous avons demandé des changements  à la convention d'achat des porcs pour tenir compte de notre réalité, mais tous ces éléments sont en délibérés devant la Régie des marchés agricoles du Québec en ce moment. On ne connaît donc pas l'entente qui va régir nos relations avec nos partenaires avant que la Régie n'annonce sa décision. Contrairement à l'ASRA, la mise en marché collective n'a pas de sortie prévue. Souvenons-nous que certains producteurs de la région de St-Hyacinthe ont fait cette expérience il y a quelques années en vendant directement des porcs en Ontario. Ils ont par la suite réintégré les rangs et remboursé leurs cotisations.

Yannick Patelli :  Ce message public de retrait de l’ASRA, démontrant l’entrepreneuriat de la compagnie, correspond bien à l’air du temps  dans une société québécoise qui se veut plus dynamique sur le plan économique. Est-ce une occasion pour DuBreton de souligner que l’Agriculture québécoise est encore trop dépendante de l’État et que les forces vives de l’agriculture pourraient mieux s’épanouir dans un système plus libre et moins réglementé ?

Vincent Breton: Excellente question? C'est sûr que l'agriculture pourrait mieux s'épanouir dans un système plus flexible (comme toute entreprise). Le problème vient principalement du fait que les exigences pour les producteurs n'ont cessé d'augmenter au fil des ans et le support, lui, constamment diminué. Les coûts des exigences environnementales et sociales n'ont cessé d'augmenter pour les producteurs en plus du fait qu'ils doivent faire face à une concurrence féroce des producteurs de l'Ouest (Canadien et Américain) qui ont des avantages importants au niveau de l'alimentation et des conditions climatiques (Ouest américain).

Au même moment, le programme qui supportait cette agriculture n'a cessé d'être modifié pour en arriver où nous sommes aujourd'hui. Pas surprenant de voir les entreprises adopter différentes solutions face à ces défis. Certains ont choisi de vendre et consolider alors que nous avons choisi de nous différencier et tenter de trouver des solutions pour la ferme familiale (espèce en voie de disparition).

Dans notre cas, nous croyons qu'un retour aux sources de l'agriculture est une solution. Une partie de la clientèle souhaite voir les choses faites de manière différente. Nous avons la conviction profonde que nos modèles de production biologique, Certified Humane et sans antibiotiques répondent à cette clientèle.  Est-ce que le modèle actuel prévoit cet éclatement? La réponse est bien sûr que non. Le modèle devrait prévoir des possibilités d'avoir des relations plus étroites avec les partenaires de la filière.

Yannick Patelli : L’industrie du porc est représentée au Québec par l’AQINAC. Est-ce une représentation efficace ou désuète à l’heure où votre groupe prend de la distance avec les aides gouvernementales et à l’heure où des rumeurs de transactions entre F.Ménard et La Coop fédérée sont de plus en plus présentes ?

Vincent Breton :  …représentée par l'AQINAC, Les Éleveurs de porcs du Québec, l'UPA, la Coop Fédéré et les quelques autres joueurs de moins en moins nombreux. C'est sûr que les joueurs indépendants dont nous faisons partie y trouvent de moins en moins leur compte. La concentration de l'industrie n'y est pas étrangère. Les besoins et objectifs de toutes ces différentes structures répondent de moins en moins aux besoins particuliers.

        Voici quelques exemples tout simples:

        1) La filière au sens large met des efforts et ressources sur la diminution de l'utilisation des antibiotiques alors que dans notre cas nous n'opérons plus de fermes commerciales qui utilisent les antibiotiques de manière systématique (nos cahiers des charges ne permettent l'utilisation d'antibiotique que pour des raisons curatives).

        2) Le logement des truies. La filière, toujours au sens large, a réclamé un programme d'aide pour  la transition des fermes alors que dans notre cas nous avons déjà cessé la production de notre dernière ferme commerciale où les truies ne sont pas libres.

        Certains aspects de cette représentation sont toujours de mise sur certains enjeux globaux de l'industrie, même s’il existe des joueurs très différents. L'accès au marché, la réglementation sur l'étiquetage des viandes, etc. Il existe des enjeux sur lesquels il peut y avoir des consensus. Par exemple, l'utilisation des termes spécifiques à l'industrie de la viande par l'industrie du ''FAKE MEAT'' ou ''viande végétale''. Il me semble que l'industrie devrait faire consensus sur ce genre de sujet et beaucoup moins prescrire les modèles d'affaire des entreprises et leurs fonctionnements.

 

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *