Il n’y a pas une semaine où la presse soulève la situation pénible qu’une grande majorité de producteurs agricoles vit au quotidien. Revenu en baisse, perte de marchés, difficultés de rembourser leurs prêts, semaines de travail interminables, suicide ou incapacité pour les jeunes de prendre la relève.
Alors que la signature de traités internationaux avec l’Europe ou l’Asie devait régler, pour une grande partie d’entre eux, l’accès à des marchés inaccessibles, voilà qu’un incident diplomatique avec la Chine bloque systématiquement l’exportation du porc ou du canola et du soya. Au lieu d’être totalement ouvertes, les portes sont verrouillées et personne ne peut prédire quand la situation sera résoute.
Le versement de l’aide tant promise aux producteurs laitiers depuis 2016 se fait toujours attendre. À l’aube du déclenchement des élections, la ministre Bibeau a affirmé en août dernier qu’un premier chèque devrait leur parvenir d’ici la fin de l’année. Est-ce à dire qu’ils l’auront juste un peu avant le vote? J’ose espérer que l’administration fédérale et la Commission canadienne du lait ne seront pas aussi malhabiles pour transmettre les chèques d’ici le 21 octobre prochain. Ce serait certes un geste malaisé au plan démocratique ; un geste étant d’une autre époque, du moins pour les électeurs du Québec.
Pour une ferme laitière moyenne de 80 vaches, une aide directe de 28 000 $ sera versée d’ici la fin de 2019. Pour les uns, c’est trop peu et insuffisant pour compenser les pertes de revenu, pour d’autres leur fierté et leur dignité en ont été affectées ne comprenant tout simplement pas les motifs exigeant d’arrêter de produire. D’autant plus qu’il est démontré que nos produits sont supérieurs en qualité en raison du respect de normes plus élevées. Lors de sa conférence de presse, elle a oublié de dire que les producteurs laitiers ont dû attendre près de deux ans et qu’ils ont dû assumer eux-mêmes les pertes de revenu pendant ces années.
Quant aux producteurs de volailles et d’œufs, il semble qu’ils devront encore s’armer de patience pour recevoir leur compensation. Aux dires de la ministre Bibeau, la distribution de ces milliards de dollars s’est avérée plus complexe que prévu.
À ce jour, ce sont des indemnisations de près de 4 milliards $ qui seront versées en raison des pertes encourues par la conclusion d’accords commerciaux. Je comprends qu’on a oublié de nous dire qu’on devra prévoir également des sommes supplémentaires pour la gestion administrative de ces indemnisations, ce que la ministre a bien omis de faire connaître en août dernier se gardant une petite gêne à cet effet.
En période électorale, monsieur et madame tout le monde sont en droit de connaître ce que le futur gouvernement réserve comme mauvaise surprise aux producteurs agricoles dans les années à venir! À l’heure où la gestion et la protection de l’environnement deviennent un incontournable et que certains groupes de pression montent au créneau pour questionner les gouvernements, fédéral et québécois, sur l’utilisation des pesticides et des insecticides, je comprends les inquiétudes du producteur agricole et la détresse que vivent certains d’entre eux.
À preuve, en France, des groupes demandent à l’État de restreindre les marges d’épandage de pesticides et d’insecticides faisant en sorte que les agriculteurs opérant près de secteurs domiciliaires risquent de perdre près de 30 % de leur surface de production. De quoi, n’est-ce pas, influencer la rentabilité de leur entreprise agricole et de leur revenu! À terme, le consommateur est-il prêt à payer un prix plus élevé ou va-t-on encore demander au gouvernement de compenser les producteurs agricoles? Au final, consommateur ou contribuable, c’est toujours la même personne qui paie!
La période électorale est un bon moment pour exiger de la part des futurs dirigeants de dévoiler leurs véritables intentions à l’égard de la protection des producteurs agricoles. Au-delà de la gestion de l’offre, la situation de nos producteurs agricoles exige qu’il faille arrêter les faux-fuyants et les paroles creuses. L’avenir de notre monde agricole est en pleine mutation et il a besoin, plus que tout autre secteur économique, de l’appui des gouvernements face aux velléités de groupuscules parlant plus fort que la majorité.
Monsieur et madame tout le monde oublie trop souvent que sans les producteurs agricoles, ils auraient quoi à se mettre sous la dent!