Cultiver en ville: possible et rentable !

Produire au Québec durant toute l’année des fruits et des légumes frais et à proximité des consommateurs, ça m’a toujours paru un peu de la fiction. Bien que souhaitable pour les consommateurs, je n’ai jamais cru jusqu’à tout récemment qu’on puisse produire en ville et durant toute l’année. Toutefois, un reportage de la Semaine verte m’a convaincu qu’on est passé de la fiction à la réalité. Ce passage à la réalité, on le doit principalement à l’utilisation de nouvelles technologies et surtout à l’audace et à l’initiative de jeunes entrepreneurs. Ces derniers produisent en milieu urbain, notamment à Montréal, Québec, Laval et Sherbrooke. Et ils font la démonstration que cultiver en ville est dorénavant possible et même rentable.

Je reviens au reportage de la Semaine verte qui porte sur les Fermes Lufa à Montréal et sur une entreprise opérant à Paris. En plein centre de Paris, l’entreprise Agricool produit dans un conteneur, des fraises. Pour y arriver, Agricool utilise une technique particulière d’hydratation des plants alors que pour la pollinisation, des boîtes à bourdons gérées par ordinateur selon les besoins font le travail. De nouvelles technologies au plan de la gestion de l’éclairage et de l’hydratation ainsi que l’automatisation de certains contrôles sont au rendez-vous pour la production d’Agricool.  Production qui se fait sans pesticide et dont le rendement est avéré exceptionnel, soit 120 fois supérieur à la culture traditionnelle en terre.

Depuis quelques mois, une autre expérience tout aussi intéressante se fait à Ottawa. L’entreprise Growcer a développé une autre formule de production à partir de conteneur maritime qu’il recycle. Selon l’entreprise, sa technique et ses technologies permettent de cultiver autant dans les régions arides que très froides où l’agriculture était jusqu’à ce jour presque impossible. Ces nouvelles façons de produire utilisent des technologies propres à l’entreprise : hydroponique, substrat, LED ainsi que des contrôles automatisés de la température et de l’humidité à distance faisant appel au Wi-Fi.

Au Québec, nous avons aussi des leaders. Depuis quelques années se pointent de jeunes entrepreneurs qui ont su relever avec brio un défi de taille en ayant l’idée de transposer les champs sur le toit d’édifices commerciaux en serre ou en terre! Le plus grand toit maraîcher qui existe actuellement au Canada c'est 2 500 mètres à 3 000 mètres carrés. À Québec, Du toit à la table réalise actuellement un projet de 3 hectares, soit 30 000 mètres carrés. C’est toute une révolution qu’il propose dans le domaine!

Selon les données du Carrefour de recherche, d'expertise et de transfert en agriculture urbaine (CRETAU), le Québec dénombre, à ce jour, 50 exploitations agricoles en milieu urbain qui touchent  à la production maraîchère, l’apiculture, la production d'insectes, la culture de champignons et de fleurs. Plus de 70 % des 50 entreprises agricoles urbaines sont implantées à Montréal.

Je me joins à la voix du directeur du CRETAU qui appelle les gouvernements à investir dans la production en milieu urbain. Force est de constater que l’implication actuelle du MAPAQ se limite essentiellement à la Stratégie de soutien de l’agriculture urbaine. Bien que cette stratégie constitue un pas dans la bonne direction, il m’apparaît important, maintenant, d’aller un peu plus loin et de prévoir rapidement y consacrer des sommes suffisantes, voire importantes, pour appuyer l’innovation et l’audace de ces jeunes visionnaires de l’agriculture. 

Au Québec, trop souvent, le gouvernement est en réaction plutôt que d’être proactif. Le gouvernement a l’habitude d’intervenir auprès d’une entreprise ou d’un secteur économique dans les moments les plus difficiles ou encore en dernier recours quand plus rien ne va. Faudra-t-il attendre que ce secteur soit en difficulté alors qu’il est plutôt en pleine croissance ou que des entreprises étrangères prennent le contrôle de la production en milieu urbain ?

La Stratégie du MAPAQ reconnaît les effets positifs à l'agriculture urbaine en termes économiques, au plan de l’environnement et de l’accès local à des fruits et légumes sains pour le consommateur. Pourrait-on penser que le ministre André Lamontagne soit cette fois-ci créatif et innovateur. Ne pourrait-il pas saisir l’occasion qui se présente et développe un programme particulier et adapté à ce type de production ? Un programme qui ferait appel au Fonds vert dont le Plan d’action vient à échéance en 2020! J’en appelle à son sens des affaires et à ses connaissances en la matière, lui qui a été jusqu’à tout récemment propriétaire et administrateur d’entreprises.

Pour une fois, monsieur le ministre, soyons audacieux et innovateur, prenons les devants avant que d’autres le fassent à notre place!

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *