Le point du CAPI suite à l’arrivée de Trump au pouvoir

L’Institut canadien des politiques agroalimentaires (CAPI-ICPA) est un lieu de dialogue et d’analyse pour élaborer des options srtatégiques tournées vers l’avenir pour le système alimentaire canadien. Il se positionne depuis l’arrivée de Donald Trump au pouvoir aux États-Unis et donne des pistes de solutions.

Que s’est-il passé?

Le 1er février, le président Trump a lancé une guerre commerciale en imposant des tarifs de 25 % sur les importations du Canada, à l’exception de l’énergie qui faisait l’objet de tarifs de 10 %. En réponse, le premier ministre Trudeau a annoncé une série de mesures de rétorsion avec une première phase des tarifs sur 30 milliards de dollars d’importations et une deuxième phase sur 125 milliards après des consultations pendant une période de 21 jours. Le 3 février, le premier ministre Trudeau et le président Trump ont annoncé que les tarifs seraient reportés de 30 jours après que le Canada a réaffirmé son engagement à renforcer les mesures en matière de drogue et aux frontières.

La menace des tarifs a mis en évidence les vulnérabilités du secteur agroalimentaire canadien, notamment la concentration des exportations aux États-Unis, et les difficultés liées à l’innovation et à la croissance, et souligne la nécessité d’un travail concertés pour régler ces problèmes structurels

Où en sommes-nous aujourd’hui?

Bien que les tarifs aient été reportés, la menace demeure et devrait motiver une réponse plus substantielle afin de mieux protéger le pays contre d’éventuels tarifs. L’analyse initiale de l’impact potentiel des tarifs fait état de 600 000 pertes d’emploi, d’une baisse de 8 % de la demande de produits agricoles, d’une réduction du PIB de plus de 4 % et de conséquences négatives à long terme.

Une analyse récente a montré que les changements en cours aux États-Unis auront un impact sur l’agriculture et l’agroalimentaire canadiens. Au cours des trente dernières années, les chaînes d’approvisionnement nord-américaines se sont développées, apportant une valeur ajoutée aux deux pays, et sont souvent très interconnectées. Les échanges agroalimentaires bilatéraux sont relativement équilibrés et représentent plus de 70 milliards de dollars. Cette interconnexion expose l’agroalimentaire canadien à un risque important en cas de guerre commerciale avec les États-Unis. La croissance de l’économie américaine, les difficultés à obtenir un accès fiable et les problèmes liés aux chaînes d’approvisionnement ont contribué à ce que les exportations agroalimentaires canadiennes soient plus concentrées aux États-Unis qu’au cours des vingt dernières années. Le Canadian Global Affairs Institute et la Canada West Foundation font partie des organisations qui étudient les enjeux plus larges du potentiel guerre commerciale.

Où allons-nous?

La réponse initiale du Canada s’est concentrée sur les mesures de rétorsion. Mais il est nécessaire d’adopter une approche plus globale pour minimiser l’impact potentiel. Bien que la menace initiale soit passée, la menace demeure et le délai de trente jours devrait être mis à profit pour redoubler d’efforts en vue d’améliorer le secteur. Les actions suivantes sont des mesures que les gouvernements devraient envisager en cas de tarifs, et d’autres qu’ils devraient entreprendre quoi qu’il arrive, élaborées dans le cadre d’un engagement avec le réseau de l’ICPA.

En cas de tarifs

  • Soutenir les entreprises : Travailler avec Financement agricole Canada et d’autres institutions pour offrir des garanties de prêt et un soutien en liquidités aux entreprises touchées, augmenter les limites du programme de paiements anticipés et relancer le compte d’urgence canadien pour les entreprises.
  • Dispense de frais pour les certificats d’exportation :
  • Réduire les coûts et améliorer la compétitivité des exportations.
  • Utiliser les GRE : Lancer un groupe de travail FPT chargé d’apporter des modifications aux programmes GRE comme le versement d’avances et l’augmentation du taux d’indemnisation ainsi que des limites de paiement
  • Introduire et prolonger une incitatif à l’investissement accéléré pour les équipements agricoles et de transformation des aliments

Court terme : Immédiatement

  • Redoubler d’efforts en matière d’accès au marché : Consacrer des ressources politiques et techniques pour lever les obstacles à l’accès au marché, notamment les exportations de viande vers l’UE et les exportations de canola vers la Chine, etc.
  • Augmenter le financement du programme de l’Agri-marketing : Augmenter le financement pour une approche plus flexible axée sur la diversification, de nouvelles stratégies et une promotion plus proactive des exportations
  • Éliminer la taxe carbone : Bien qu’ils ne fassent pas partie du portefeuille agricole, les gouvernements devraient soutenir la compétitive du secteur en éliminant la taxe sur le carbone imposée sur le secteur agroalimentaire.
  • Donner la priorité aux transformateurs : Le sous-ministre d’AAC devrait présider un groupe de travail pour élaborer des solutions ciblées à l’industrie de la transformation alimentaire qui supportera le poids des tarifs.
  • Allégement réglementaire : Suspendre les nouvelles initiatives réglementaires qui peuvent imposer des fardeaux et lancer un processus visant à supprimer les réglementations existantes qui entravent la compétitivité.

Moyen terme :  6 à 12 mois

  • Réinitialiser l’agenda du commerce agricole : Le gouvernement et l’industrie devraient élaborer un programme commercial stratégique axé sur la relance et la conclusion des négociations commerciales et de l’OMC.
  • Réinitialiser l’agenda nord-américain : Les trois ministres de l’agriculture devraient s’efforcer de rétablir la confiance en Amérique du Nord en se concentrant sur la coopération en matière de réglementation.
  • Collaborer avec des partenaires stratégiques : Le ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire devrait réunir les partenaires internationaux, peut-être en parallèle avec la G7, afin d’améliorer la collaboration face aux menaces américaines
  • Diversifier les importations : Élaborer une stratégie d’intrants agricoles essentielle visant à réduire la dépendance à l’égard des intrants provenant des États-Unis notamment les engrais, les produits phytosanitaires, les ingrédients alimentaires et les emballages.
  • Supprimer les barrières internes : Les ministres FPT devraient agir sur un plan d’action sur la suppression des barrières commerciales internes et harmoniser les réglementations lors de leur réunion de juillet 2025

Long terme : au-delà de 12 mois

  • L’accord FPT : Le cadre de la politique agricole devrait être revigoré, en se concentrant sur la stabilité et la croissance par le biais de la productivité et du développement des marchés.
  • Innover pour être compétitif : Relancer l’innovation dans le secteur par des programmes ciblés et une réforme de la réglementation afin d’améliorer la compétitivité des agriculteurs et des transformateurs de produits alimentaires.
  • Améliorer la fiabilité des échanges commerciaux : Accélérer le financement de l’infrastructure commerciale, faire avancer le plan d’infrastructure commerciale du Canada et Groupe de travail national sur la chaîne d’approvisionnement et légiférer pour atténuer les perturbations du travail.
  • Ajouter de la valeur : Les gouvernements doivent soutenir les initiatives de la chaîne de valeur afin d’ajouter de la valeur au Canada par le biais d’une transformation accrue, d’une différenciation, et d’une spécialisation, etc.
  • Nouvelles approches internationales : Le Canada devrait explorer de nouveaux moyens de tirer parti de la sécurité alimentaire pour approfondir les relations avec les principaux importateurs, notamment le Japon et la Chine

Pourquoi est-ce important ?

Cette note de breffage se concentre sur le secteur agroalimentaire, mais tous les Canadiens connaîtront une hausse de l’inflation des denrées alimentaires. Des mesures devront être envisagées pour faire face à ces conséquences. Les solutions décrites ci-dessus permettront d’atténuer l’impact d’une guerre commerciale potentielle. Toutefois, elles peuvent également contribuer à résoudre les problèmes structurels à long terme auxquels le secteur est confronté. Quoi qu’il en soit, les gouvernements devraient les considérer comme faisant partie d’un programme de politique agricole et agroalimentaire plus ciblé et orienté vers l’action.

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