
(LVA) La Vie agricole toujours soucieuse de donner place à toutes les opinions, vient de lire : Les Illusionnistes, éditions Robert Laffont par les journalistes d’enquête Géraldine Woessner et Erwann Seznec – 424 pages, nous vous invitons ici à en lire un extrait. Un livre d’enquête qui ne laissera pas indifférent. Attention aux âmes sensibles! Le débat est lancé…
« Il y a une grande différence entre risque et danger. Le transport ferroviaire est très dangereux. Un TGV lancé à pleine vitesse met plusieurs kilomètres à s’arrêter. Des procédures très strictes sont donc mises en œuvre, de manière à réduire les risques. Notre logement, à l’inverse, est le lieu de la détente par excellence, celui où nous baissons la garde. Résultat, les accidents domestiques tuent 20 000 personnes chaque année en France, contre quelques dizaines pour les accidents ferroviaires ( 47 exactement en 2021).
Dans le champ politique, le parti le plus dangereux en France reste probablement le Rassemblement national ( RN). Même s’il a beaucoup changé, il garde la nostalgie de l’homme ou de la femme providentiels. Il entretient le culte de l’autorité et un certain mépris de l’intellectualisme. Ce sont des penchants qui mènent facilement à la dictature. Toutefois, comme le RN est sous étroite surveillance de la presse, de la justice, des organisations non gouvernementales et de ses adversaires politiques, il ne dévie plus des rails démocratiques.
Les écologistes, au contraire, ne font peur à personne. Ils agacent, ils horripilent, ils navrent, ils choquent, ils amusent, mais ils effrayent peu. Cette enquête vise à démontrer que c’est la raison pour laquelle l’écologie politique constitue, aujourd’hui, le courant de pensée faisant courir le plus de risques à notre pays. Ses militants et ses élus sont sincères, dévoués, républicains, le plus souvent cultivés et généralement, sympathiques.
On se méfie si peu d’eux qu’il aura fallu attendre quelques décennies pour que les conséquences réelles de leur idéologie commencent à apparaître.
Le coup de génie ( probablement involontaire) de l’écologie politique aura sans doute été de monopoliser les rôles de lanceur d’alerte, en s’affranchissant, paradoxalement, de toute distinction entre risque et danger. Avez-vous pensé au péril des pesticides, du nucléaire, des OGM ( organismes génétiquement modifiés), des ondes électromagnétiques, des perturbateurs endocriniens? Que comptez-vous faire contre l’effondrement de la biodiversité? Combien de temps devrons-nous supporter les émanations des moteurs thermiques? Les alertes ont été entendues, car elles pointaient à chaque fois un danger réel.
Les remèdes proposés, hélas, étaient souvent pires que le mal. Illustration la plus nette : le nucléaire. L’abandon de la filière, acté en Allemagne, programmé en France, s’est traduit par un désastre.
L’Europe a perdu en compétitivité et en indépendance énergétique. Elle a rouvert des centrales à gaz et au charbon, fortement émettrices de CO2, pour compenser l’intermittence des énergies renouvelables.
Dans le cas des restrictions à l’emploi de phytosanitaires et de l’interdiction des OGM, le bilan est tout aussi déprimant. L’agriculture française perd lentement en efficacité, sans gain avéré pour l’environnement.
« Globalement, l’impact de l’agriculture biologique sur l’environnement n’est pas sensiblement meilleur que celui de l’agriculture conventionnelle. Si l’on raisonne à la quantité produite, il est même fréquemment moins bon»*, relevait un rapport réalisé en 2021 par Fondapol. À l’hectare, le bio impacte moins la nature, mais comme ses rendements sont faibles, il est plus gourmand en espace et sa généralisation entraîne déforestation et perte de biodiversité. Cela est simple à comprendre, de la même manière que, quand il n’y a pas de vent, les éoliennes ne tournent pas. Et sans traitement, les nuisibles s’attaquent aux cultures. Un enfant de huit ans le saisit.
Les militants écologistes et les élus ne le verraient pas? C’est peu probable. Pourquoi alors, ne tirent-ils pas les leçons des erreurs du passé? Pourquoi ne pas rectifier le tir?
(…)
Comment expliquer que des solutions accessibles, validées par la science, soient bloquées avec application, précisément par ceux qui ont fait de la lutte pour la protection de la planète leur combat cardinal?
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Pour comprendre ce paradoxe, et les raisons pour lesquelles les représentants de l’écologie politique en viennent parfois à prôner des politiques contraires au but poursuivi, il faut remonter aux racines historiques du mouvement écologiste, profondément religieuses. Et rétablir un fait que vous n’avez, cher lecteur, sans doute pas conscience : ce mouvement n’a qu’un lien extrêmement ténu avec la science écologique.
*Bernard Le Buanec, L’Agriculture bio et l’environnement, rapport Fondation pour l’innovation politique, 2021.