Le système agroalimentaire canadien a connu une année remplie de défis et de possibilités en 2021. On a compris que le contexte politique du secteur agroalimentaire canadien est devenu beaucoup plus dynamique qu’il y a des années ou des décennies. L’année 2021 a également fait comprendre que, malgré le besoin crucial pour le Canada de produire plus d’aliments tout en réduisant l’empreinte écologique et en accroissant la rentabilité pour les producteurs, le système agroalimentaire pourrait ne pas être bien préparé. Il y a un besoin immédiat de solutions stratégiques créatives qui recoupent la sécurité alimentaire, l’environnement et le commerce.
Tyler McCann
Tout au long de l’année, les manchettes ont porté sur les défis qui empêchent les parties prenantes du système agroalimentaire de dormir la nuit. Qu’il s’agisse des sécheresses dans les Prairies et des inondations en Colombie?Britannique et dans les Maritimes, de la cible fédérale de réduction de 30 % des émissions d’azote, de l’obsession à l’égard des bovins à la COP26, des interdictions soudaines imposées aux exportations de viande vers la Chine et de pommes de terre vers les États?Unis, du moratoire politique sur l’augmentation de la limite maximale de résidus de pesticides ou des préoccupations croissantes au sujet de l’inflation, c’est une chose après l’autre.
Les possibilités ne font peut?être pas les manchettes, mais elles stimulent tout autant l’agriculture canadienne.
Citons l’augmentation des exportations et de la demande intérieure qui fait grimper les prix pour la plupart des agriculteurs (tant pour les achats que pour les ventes), la résilience démontrée à force de lutter contre la COVID?19, les investissements historiques dans l’agriculture climato?intelligente annoncés dans le budget fédéral, l’annonce d’investissements dans de nouvelles installations de transformation, la conclusion d’une entente fédérale?provinciale?territoriale sur l’Énoncé de Guelph et la modernisation par Santé Canada de son approche pour réglementer les innovations en matière de sélection des végétaux. Ce ne sont là que quelques?unes des raisons pour lesquelles le système agroalimentaire canadien doit être optimiste à la fin de 2021.
Ces défis et ces possibilités mettent en évidence l’ampleur des changements dans le contexte politique du système agroalimentaire canadien.
La fin des années 1990 et le début des années 2000 ont constitué une période difficile pour l’agriculture, compte tenu de l’importante diminution des revenus agricoles, de la détection et des retombées des cas d’encéphalopathie spongiforme bovine et de l’accroissement des pressions lors des négociations avec l’Organisation mondiale du commerce. Au milieu des années 2000, la plupart de ces crises s’étaient calmées et un faible consensus sur la politique agricole s’était établi. En s’appuyant sur le soutien manifesté dans les années 1990 à l’égard d’un commerce plus ouvert et plus libéralisé et sur le désir d’accroître l’efficience et la productivité, les gouvernements et les parties prenantes du secteur de l’agriculture ont préconisé une politique agricole fondée sur un niveau raisonnable de programmes de gestion des risques et d’investissements stratégiques dans l’accès aux marchés et le développement, la recherche, l’innovation et la transformation à valeur ajoutée.
Toutefois, cette dernière année a renforcé le fait que les attentes en matière d’agriculture et d’alimentation ont changé, et que le faible consensus semble s’estomper, avec plus de gens offrant plus de perspectives sur ce à quoi devrait ressembler l’avenir de la politique agroalimentaire.
Il est impératif d’améliorer l’incidence environnementale, sociale et économique du système agroalimentaire
Les raisons de ce changement sont complexes, mais elles sont fondées en partie sur la réalité qu’à un moment où il est impératif pour le système agroalimentaire d’améliorer considérablement son incidence environnementale, sociale et économique, le nombre d’attentes de l’extérieur du système agroalimentaire traditionnel s’accroît en ce qui concerne la façon de procéder et la détermination des priorités. Les gouvernements, les investisseurs, la société civile et les consommateurs exigent tous une meilleure situation, tandis que les producteurs et les transformateurs exigent la capacité de faire concurrence. Cette tension s’est manifestée lors du Sommet sur les systèmes alimentaires des Nations Unies, qui s’est déroulé tout au long de 2021.
Cette tension est également mise en évidence par le besoin crucial cerné par l’Institut canadien des politiques agroalimentaires (ICPA) au début de l’année : Un système agroalimentaire plus résilient qui produit davantage et mieux, de façon durable sur le plan environnemental et rentable, de façon à répondre aux besoins et aux désirs croissants des consommateurs au Canada et dans le monde entier.
La recherche de solutions qui s’adaptent au contexte évolutif et qui répondent à ce besoin crucial oriente le programme de l’ICPA. Cette recherche a également été au premier plan du Forum des grandes solutions (FGS) de l’ICPA, qui s’est déroulé pendant plusieurs jours en mai. Le FGS a constitué l’aboutissement du programme de recherche Créer de la prospérité à partir du chaos, qui comportait des dialogues, des recherches et des webinaires au cours de l’année précédente. Les présentations du FGS, notamment l’exposé de M. Christopher Barrett sur le regroupement des innovations pour les transformations du système alimentaire, et les tables rondes avec les sous?ministres et les chefs de file de l’industrie, peuvent être visionnées sur la page YouTube de l’ICPA.
Dans le rapport définitif du FGS, l’ICPA a mis en lumière deux conclusions : 1) Le système agroalimentaire canadien présente beaucoup de potentiel et est en mesure de contribuer à la production alimentaire durable, à la sécurité alimentaire mondiale et aux solutions de lutte contre les changements climatiques, tout en améliorant ses avantages concurrentiels; 2) Notre capacité de recourir à des connaissances multidisciplinaires pour créer des solutions nous offre de grandes possibilités, relativement inexploitées.
4 mesures simples, mais difficiles à mettre en oeuvre
L’ICPA a ensuite déterminé quatre mesures clés nécessaires pour créer de la prospérité à partir du chaos : Approches systémiques; réflexion stratégique; partenariats public?privé; leadership ambitieux.
Ces quatre mesures simples se sont révélées incroyablement difficiles à mettre en œuvre pour le système agroalimentaire canadien. Cependant, elles pourraient grandement permettre d’atténuer les difficultés et de saisir pleinement les occasions qui se présentent.
Au moment où les parties prenantes du système agroalimentaire se tournent vers 2022, où le contexte politique continue d’évoluer et où il est de plus en plus essentiel de produire davantage et mieux, de façon durable sur le plan environnemental et rentable, nous devons réfléchir à la façon de mettre en œuvre ces quatre mesures.
Nous ne pouvons pas nous permettre d’ignorer ce besoin crucial. Ce n’est pas non plus une situation qu’une partie prenante peut régler seule. Un contexte politique complexe et dynamique exige de s’éloigner du statu quo pour adopter des solutions créatives – des solutions élaborées ensemble. Il faut une équipe pour élaborer des politiques et être ouvert aux grands changements lorsque les contextes évoluent rapidement. Si l’on se fie à l’année 2021, l’équipe de la politique agroalimentaire sera très occupée en 2022.