« Si c’est légal, c’est immoral», dit Laurier Gauthier

Laurier Gauthier, producteur de lait et acériculteur, ancien maire de St-Basile de Portneuf s’inquiète de ce qu’il adviendra des parts privilégiées des coopératives suite à ce qu’il vit avec la coopérative Purdel depuis plusieurs années.

 

Un producteur laitier lésé par une coopérative?

La coopérative Purdel lui doit près de 8000 $ pour lesquels la coopérative n’est prête à reverser que quatre fois moins. Après avoir consulté son député puis son avocat, M.Gauthier a décidé de déposer sa requête aux petites créances, mais le juge Denis Roy a estimé ne pas être en mesure de prendre une décision. «Le juge décline compétence», déclare M. Gauthier se référant au jugement qu’il tient dans les mains. On sait qu’un jugement aux petites créances est sans appel ce qui fait dire à Laurier Gauthier : «J’ai perdu mon temps et je n’ai toujours pas mon argent».

M.Gauthier s’offusque de la situation surtout qu’il considère que la coopérative Purdel fait « suffisamment d’argent» pour le rembourser dans sa totalité.

Laurier Gauthier rencontre aussi lors de son parcours du combattant au fil des ans l’ancien président de Purdel qui lui répond qu’il n’y a pas d’autres options et l’informe aussi qu’il ne peut plus assister aux assemblées générales de la coopérative puisqu’il n’est plus membre.

«Mon option, je ne sais pas, ça fait déjà 25 ans que j’attends ( …) le dossier n’a pas de rendement et pas de date de rachat», s’inquiète le producteur.

Est-ce une situation possible dans d’autres coopératives ?

Il faut espérer que non, mais cela inquiète tout de même le producteur qui détient plus de 600 000 $ en parts privilégiées dans d’autres coopératives telles Agropur, Citadelle et Novago.

« J’aurais jamais cru qu’une coopérative pourrait avoir ce pouvoir-là. Les votes à main levée, j’y crois de moins en moins quand l’assemblée est bourrée», déclare le producteur.

La Loi des coops : égale pour tous

Les règles sont claires dans la loi des coopératives et Laurier Gauthier les a révisées lui qui garde précieusement le manuel des coopératives sur sa table de cuisine : M.Gauthier nous explique que si on rachète des parts privilégiées dans une coopérative c’est pour tout le monde égal sauf en cas de décès pour régler des successions. Alors pourquoi cette tentative de gré à gré ?

Une particularité chez Agropur

La Loi des coopératives c’est donc pareil pour tout  le monde sauf chez Agropur où il y a une particularité qui surprend d’ailleurs M. Gauthier : «Dans le cas d’Agropur lorsqu’il y a une mort prévisible dans les deux ans, il peut y avoir remboursement», nous explique M. Gauthier, mais précise-t-il « Ça, c’est un non-sens».

 

Peut-on se faire rembourser en bloc toutes les parts privilégiées dans une coopérative ? Agropur pourrait-elle verser d’un coup à M.Gauthier son 304 000 $ investi en parts privilégiées ?

«Jamais, ça me surprendrait qu’Agropur ait une assez bonne année pour ça, car ils doivent 800 et quelques millions en capital privilégié chez Agropur». Et celui-ci de nous expliquer que pour le remboursement des parts privilégiées de toute façon on a dix à douze ans en arriérages dans les remboursements sur les placements en parts privilégiées de l’époque.

Quelle réalité pour la valeur des parts privilégiées dans les coops ?

Très heureux d’être membre d’Agropur, de Citadelle et de Novago, M.Gauthier nous confie «Tant que je vais vivre, je ne pense pas en sortir », mais il nous précise que l’expérience vécue avec Purdel peut alerter sur ce que peuvent éventuellement faire les coopératives lorsque nous lui demandons si la dévaluation à 25 % de la valeur des ses parts privilégiées telle que vécue chez Purdel pourrait devenir aussi une réalité chez Agropur, Citadelle ou Nivago, il nous dit « Théoriquement c’est possible (…) si Purdel le fait sur conseil de leur avocat (qui en passant est le même que le nôtre chez Citadelle), les autres pourraient le faire aussi ».

M.Gauthier ne ferme pas la porte à trouver d’autres producteurs dans sa situation pour lancer possiblement un recours collectif : « Moi ce que je considère actuellement, si leur façon de faire est légale c’est immoral à tout le moins».

Sur la ferme face à l’inflation galopante : Quelles solutions ?

Sur l’actualité et l’augmentation de 8,4 % du prix du lait à la ferme, Laurier Gauthier estime que la seule solution pour un producteur laitier c’est aujourd’hui de toujours travailler plus pour éviter l’appauvrissement.

«Selon M.Brassard, notre représentant pour la Capitale nationale dans le lait, il nous a expliqué que l’on avait une augmentation de 8,4 %, mais que le coût de production du lait à la ferme a subi une inflation de 13 %, donc moi j’ai conclu qu’on avait un appauvrissement de 5 % ( …) je pense que l’inflation galopante va être encore plus grande que ça (…) la seule façon de gagner notre vie honorablement c’est de travailler toujours un peu plus, mais il y a un appauvrissement potentiel parce que l’inflation est plus rapide que l’augmentation du prix», dit M. Gauthier.

Inquiétude sur les quotas rachetables sans lien avec le territoire

M.Gauthier, producteur d’expérience à la fois dans le monde du lait et dans le monde acéricole, explique que le quota acéricole est attaché à l’érablière alors que dans le lait le quota «peut se promener à grandeur de la province» et il s’inquiète que cela vide à terme les régions. La logique du monde acéricole ne s’applique pas au monde laitier et cela inquiète Laurier Gauthier : «Le risque à long terme c’est que ça déplace le lait des régions», dit-il.

Les plus gros producteurs recevant plus de kilos/jour que les plus petits, on risque alors de voir une plus grande concentration des fermes laitières et une problématique d’occupation du territoire, nous explique M. Gauthier.

À la question de La Vie agricole à savoir si une discussion sur le secteur laitier est utile en ce moment M.Gauthier nous répond :

«Ça dépend de ce qu’on veut et où on veut en venir»

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