L’économie du Canada a pratiquement frôlé la catastrophe lors du dernier conflit chez les deux grands transporteurs ferroviaires du Canada, le CN et le CPKC. Le renouvellement des conventions s’est fait bizarrement en même temps pour les deux transporteurs. Les menaces de grèves ou de lock-out se sont matérialisées par un arrêt de service pour les deux transporteurs, obligeant le ministre des Transports à intervenir très rapidement afin d‘éviter une crise majeure pour l’économie canadienne. Sans cette intervention le dommage aurait été sans précédent, avec en prime, probablement, un rebond de l’inflation.
Le 22 août dernier, les deux compagnies se sont mises en lock-out, avant que les employés se mettent en grève, assez rapidement le ministre des Transports a utilisé son pouvoir d’imposer un arbitrage exécutoire, et a rappelé au travail tout le monde le lundi. L’arrêt de travail aura duré 4 jours.
L’imposition par le ministre d’un arbitrage exécutoire est plutôt rare au Canada, généralement le gouvernement préfère utiliser une loi de retour au travail quand les parties en conflit ne s’entendent pas et que la situation dégénère, affectant potentiellement le bien-être des Canadiens.
Cette fois-ci, la menace était présente, et probablement la pression des Américains qui voyaient dans cet arrêt de travail une menace sérieuse sur leur économie a été décisive. Les deux éléments ont poussé, ou plutôt obligé le ministre à ordonner un retour au travail.
Il est très surprenant, compte tenu du quasi-monopole (on appelle cela un oligopole) et de l’importance dans le transport des marchandises que le CN et le CPKC ont ensemble (plus de 80% du trafic ferroviaire) que le gouvernement ait laissé la négociation se terminer en mêmes temps.
Du côté syndical, rappelons que c’est le même syndicat (teamster) qui représente les travailleurs, un monopole. De plus quelques jours avant l’arrêt de travail, le gouvernement ne semblait pas hausser le ton vis-à-vis les deux parties, se contentant de dire qu’une entente négociée était souhaitable.
Pourtant c’était un secret de polichinelle que les deux parties étaient dans une impasse depuis des mois. Le gouvernement semble avoir dormi au gaz. Encore pire, il a très mal géré le dossier en laissant les conventions se négocier en même temps.
En agriculture, l’effet de ce conflit s’est fait sentir sur plus de 4 semaines, en mettant de la pression sur les chaînes logistiques afin de se faire des stocks en prévention de l’arrêt de travail, bien que dans certains cas la constitution de stock étant pratiquement impossible faute d’entrepôts.
Cette pression s’est rapidement fait sentir par une hausse importante des commodités, un exemple, pour la protéine utilisée en nutrition animale, les prix ont augmenté de plus de 20% et la disponibilité a été restreinte. Certains animaux ont vu leur ration journalière amputer, causant par le fait même dans les deux cas une hausse des coûts de production.
L’arrêt de travail a duré 4 jours. Si le gouvernement avait utilisé une loi de retour au travail, ce qui aurait, compte tenu des délais, prolongé le conflit probablement d’une à deux semaines, l’effet aurait été catastrophique et aurait eu un impact majeur sur la hausse des prix d’une multitude de commodités stratégiques, et sur les finances de plusieurs entreprises (fermes incluses). Tout pour relancer solidement l’inflation!
À mesure que le rythme de l’innovation s’accélère dans les transports, tels les véhicules connectés et automatisés, les relations de travail devront s’adapter, ce qui risque de provoquer des conflits de travail majeurs. Les gouvernements sont bien au courant, mais ne semblent pas proactifs à encadrer ces conflits afin de préserver l’économie canadienne.
Le CN et le CPKC et leurs employés se sont fait donner par les Canadiens et leurs gouvernements un monopole. Normalement en contrepartie d’un monopole (qui est très payant) les gouvernements devraient exiger certaines garanties, le maintien du service en est une.
Malheureusement au Canada, on a peur face à ces puissants monopoles, on laisse faire et souvent on fait des chèques au lieu de contrôler et légiférer : un paradis pour ces groupes.