Québec 3 avril 2014 – Nous avons profité de la présence de Marcel Groleau, président de l’UPA, à l’assemblée générale des producteurs de bovins du Québec pour obtenir une entrevue en tête à tête avec lui. Nous l’avons interpellé sur deux sujets chauds : L’accaparement des terres agricoles et la faillite de l’abattoir Lévinoff-Colbex
LVA: Que dites-vous aux producteurs de bovins dissidents qui se sont réunis en association et qui demande votre démission par la bouche de Vincent Kelhetter?
Marcel Groleau a précisé qu’il ne fallait pas vivre dans le passé. Il trouve la situation regrettable mais demande aux producteurs de regarder l’avenir.
“Lorsqu’on a pris la décision d’acheter Levinoff-Colbex c’était la dernière solution, la première était d’avoir un prix minimum et les gouvernements n’ont pas voulu intervenir. Je savais que c’était un risque mais c’était la seule solution. Je le reconnais ça a été un échec mais on assume cet échec-là. On doit fermer les livres et passer à autre chose.“
LVA : Croyez-vous à la relance de l’abattoir par une coopérative ?
“Moi personnellement la contribution de 1000 $, je l’ai avancée. Si elle voit le jour cette coop-là, elle va avoir besoin de ses membres. La compétition est tellement forte et les autres joueurs tellement gros. On aura besoin de la patience des membres et il faudra viser des marchés de commodité.“
LVA : Mais vous êtes conscient que maintenant le bœuf voyage entre 1500 et 8500 kms avant de revenir au Québec ?
“Provigo a multiplié par quatre leur étalage pour les produits bio carnés. Le bœuf sans hormones est un marché aussi et on importe du bœuf de l’Australie, y’a des aberrations“.
LVA : Et quand le bœuf revient des abattoirs américains on n’a plus de garantie qu’il soit québécois ? C’est un bœuf américain !
LVA : Avec les normes américaines ?
“Oui mais avec l’entente de libre-échange Canada-Europe, pour exporter en Europe, ils exigent du bœuf élevé et abattu au Canada donc il y a certaines opportunités pour la coop. Moi je ne demande pas aux gouvernements un soutien pour l’abattoir dans ce projet-là mais un soutien gouvernemental pour le développement d’une filière de produits spécifiques.“ Marcel Groleau reconnait qu’il est conscient que le bœuf du Québec, une fois abattu aux États-Unis, n’est qu’un bœuf nord-américain avec les normes nord-américaines et qu’on ne mange donc pas du bœuf canadien en tant que tel. Toutefois avec l’accord de libre-échange, l’exigence du traité pourrait amener à produire du bœuf abattu ici et c’est sur cela qu’il pense baser ses espoirs.
LVA : Vous n’avez pas prononcé le nom SADAQ en assemblée mais vous semblez encore dire que les fonds d’investissements qui achètent des terres sont dangereux pour le maintien de la propriété agricole dans les mains des producteurs. Que répondez-vous à ceux qui disent après l’épouvantail des acheteurs chinois, on fait peur avec un autre épouvantail ?
“Non, l’inquiétude est réelle et à travers le monde. C’est une crainte sincère car ils sont déjà sur le terrain. On peut nommer Agri-Terra en Mauricie; Partenaires SEC qui travaille à monter un fonds d’investissement de 50 millions de dollars; Pangea, un groupe actif dans la région de Lanaudière et au Lac-Saint-Jean. C’est pas un épouvantail. C’est un phénomène international !
LVA : Quand ce sont des investisseurs qui sont aussi des agriculteurs est-ce que ça change la donne ?
Non, moi je ne veux pas m’interposer. Ce que je souhaiterais c’est que le marché reste un marché entre agriculteurs. Ces gens-là sont des compétiteurs difficiles à surmonter !
LVA : Que dites-vous à l’agriculteur dans le champs qui dit qu’il ne veut pas de l’intervention de l’État dans l’achat de terre ?
“Je suis d’accord avec les producteurs qui ne veulent pas d’intervention de l’État mais on souhaite un marché qui reste entre producteurs agricoles. Peut-être que ça a été mal compris ! Est-ce que la SADAQ fait l’unanimité non ? À cause du droit de préemption. Est ce qu’on peut trouver d’autres moyens là-dessus. J’interpelle les producteurs.