Le problème: les riches d’un côté et les pauvres de l’autre !

par Yan Turmine
Tel que promis, le ministre Gendron a mis fin à la mesure du 25 % du programme de l’ASRA. Cette mesure, mise en place par l’ancien gouvernement, ne prenait pas compte dans le calcul du cout de production des données des 25% moins bonnes fermes sondées. Cette façon de faire faisait en sorte de diminuer les compensations d’ASRA que les producteurs pouvaient s’attendre à recevoir. Cette nouvelle de l’abolition du 25 % fut bien accueillie dans le monde agricole, surtout dans plusieurs productions animales. Maintenant reste à savoir si c’est un premier pas vers une réforme en profondeur de l’ASRA ou un geste politique isolé.
De toutes les mesures de resserrement qu’avait mis en place le gouvernement précédent, la mesure du 25 % était celle qui répondait le plus à une motivation de couper la couverture financière au producteur. Cette mesure du 25 % accompagnée des autres mesure, incluant le remboursement du déficit de la caisse de l’ASRA (la cotisation à l’ASRA n’est plus comptabilisée dans le cout de production), faisait en sorte que le programme de l’ASRA était devenu un programme palliatif, afin d’accompagner les fermes vers leur mort. Originalement l’ASRA était un programme qui compensait les producteurs lorsque les prix du marché ne rencontraient pas les couts de production, afin de leur garantir le salaire d’un ouvrier spécialisé. Quand les prix du marché étaient largement supérieurs au cout de production, les producteurs renflouaient la caisse de l’ASRA. Aujourd’hui l’établissement de la compensation et de la cotisation est assez complexe. Elle respecte encore ses principes originaux, mais elle tient compte aussi de certaines particularités financières individuelles ainsi que de l’arrimage des programmes d’aide fédéraux.
Cependant lorsqu’un programme de soutien à la production comme l’ASRA ne permet plus de couvrir les couts de production année après année, il devient inutile. Pour un producteur de ne pas couvrir ses couts par 1000, 10.000 ou 100. 000 dollars, cela lui indique seulement quand il va perdre sa ferme. Il devient alors un malade au soin palliatif à la recherche de la pilule qui le maintiendra en vie le plus longtemps possible dans l’espoir d’un miracle. Dans une telle situation, il est normal d’arrêter de développer, d’investir dans le futur.
Il est quand même surprenant que le Québec ne soit pas en mesure d’offrir un vrai programme de soutien à la production et que l’on soit rendu à n’offrir qu’un programme palliatif comme l’était devenu l’ASRA avec la mesure du 25%.
Les revenus agricoles n’ont jamais été aussi bons
Les revenus agricoles n’ont jamais été aussi bons, mais mal repartis entre les productions. Ce phénomène de mauvaises répartitions des revenus risque d’ailleurs de s’amplifier dans le futur. Le secteur des grains affiche des revenus record, le secteur de l’élevage des déficits record (cela a déjà été le contraire).Pourtant chacun de ces secteurs est dépendant l’un de l’autre à moyen et à long terme. La disparité économique entre les productions sous gestion de l’offre et celle qui ne le sont pas est devenue caricaturale.
Les riches d’un côté et les pauvres de l’autre. C’est un peu la démonstration que quelque chose ne va pas, pourtant l’état injecte des centaines de millions par année dans l’agriculture.
L’agriculture n’est pas un canard boiteux, bien au contraire. C’est un puissant moteur économique pour le Québec dans son ensemble. Par rapport à beaucoup d’endroits dans le monde l’agriculture québécoise a des atouts majeurs : Premièrement une expertise, des infrastructures, des sols, un climat qui contrairement a ce que l’on pense a plusieurs avantages. Les programmes gouvernementaux de soutiens ne doivent pas être l’essence de ce moteur économique, mais l’huile. Ils doivent en répartir les revenus, mais aussi soutenir une agriculture qui respecte les exigences de notre société en matière d’autosuffisance et de sécurité alimentaire, en termes de respect environnemental et de respect social.
L’abolition du 25% est un pas en avant afin de reformer le programme de soin palliatif qu’était devenu l’ASRA. Le défi est grand, il y a beaucoup d’intérêt, et c’est au gouvernement de mettre en place les programmes du futur.

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