Si les spécialistes de la santé et les chercheurs sont préoccupés par la détresse psychologie dans le milieu de l’agriculture, plusieurs producteurs voient la situation d’un tout autre œil. On constate présentement une volonté d’investissements, d’informatisation, de modernisation et d’innovation dans le milieu, prouvant un grand dynamisme dans les entreprises. La Vie Agricole a approché chercheurs, spécialistes, conseillers ainsi que petits et gros producteurs «loin d’être dépressifs».
Un milieu dynamique
Jacques Cartier, président du Conseil des entrepreneurs agricoles, croit que l’agriculture est un milieu dynamique comprenant des entrepreneurs motivés : «Il faut regarder l’ensemble des agriculteurs et on voit que c’est juste une petite partie qui est touchée par la détresse.» Au niveau de la succession, M. Cartier observe une problématique tout autre que celui du manque de relève. «Au contraire, il y a trop d’acquérants potentiels pour le nombre de fermes disponibles», affirme-t-il. Le PDT observe, dans son milieu de travail, plusieurs jeunes prêts à investir et stimulés par la reprise d’une ferme familiale.
Selon les recherches de Bruno Jean, professeur en développement régional à l’Université du Québec à Rimouski et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en développement rural, les municipalités du Québec mettent de l’avant l’importance de reconnaître le développement local. Le chercheur promeut le développement des capacités des communautés rurales : « [Il faut] une communauté active qui prend des initiatives pour résoudre ses problèmes elle-même; […] qui prospère en se basant sur les compétences et les ressources locales[,] qui est capable de prendre en compte les attentes de ses citoyens [et qui est] alimentée par un esprit d’entreprise.»
Des changements bénéfiques
Le milieu de l’agriculture prospère de nos jours. Toutes les ressources maintenant en place pour soutenir les agriculteurs permettent d’intervenir rapidement dans le cadre de situations problématiques et de trouver des solutions aux difficultés.
Alexandre Couture est un jeune gestionnaire conseiller agricole, passionné par son métier. Issu d’une famille agricole, il a étudié en agronomie afin de pouvoir aider les agriculteurs avec leur propre entreprise. Dans le cadre de son travaille, le conseiller agricole constate une croissance et une prospérité des entreprises.
«Les entreprises cherchent toujours à s’améliorer pour augmenter leur rentabilité. On est en train de vivre une transformation des fermes : elles deviennent des entreprises agricoles. Maintenant, c’est assez gros, il y a des employés, les agriculteurs sont des gestionnaires. Ils gèrent de gros business avec des employés et ils sont fiers de ce qu’ils font.»
Selon le gestionnaire, la transformation actuelle du milieu contribue grandement à briser l’isolement des agriculteurs. Les entrepreneurs agricoles sont maintenant en contact avec plusieurs autres producteurs, avec les intervenants du milieu et sont ouverts sur le monde. «Avec l’accès à internet d’aujourd’hui, ils sont informés. Des fois, ils sont même au courant de l’information avant nous!»
De petites et grosses entreprises qui réussissent
Adrien Breault, un des plus grands producteurs laitiers de l’Estrie depuis plus de 40 ans, témoigne de la vitalité du milieu qui l’entoure : «Moi, dans ma région, je vois des silos qui poussent, des bâtiments de ferme qui se bâtissent, des producteurs qui s’arrachent les terres dès qu’elles sont mises en vente, des entreprises solides et des jeunes qui reprennent la relève.» Le fait que les entreprises soient de plus en plus grosses ne serait pas un facteur aggravant le stress, selon le producteur, mais au contraire, contribuerait grandement à diminuer le stress engendré par l’entreprise. Dans les grandes productions, plusieurs employés participent aux travaux, ce qui permet de meilleures conditions de travail pour tous. M. Breault vient de céder son entreprise à quatre jeunes producteurs motivés et perfectionnant l'entreprise avec des techniques à la fine pointe de la technologie.
De son côté, Andréanne Viau, dirige une petite ferme laitière avec son conjoint. Suite à la reprise de la ferme familiale, la jeune productrice explique que ses parents participent toujours à la vie sur la ferme en apportant, entre autres, une aide au cours de l’été avec les enfants et la comptabilité. Le jeune couple a apporté plusieurs changements à la production «en se lançant tête première» et en utilisant des façons de faire différentes. Le couple souhaite garder une ferme gérable à deux. «Le côté familial est important pour moi», explique Mme Viau, «je trouve que ça donne de bonnes valeurs aux enfants : l’autonomie, la débrouillardise. Il est important pour nous d’avoir une vie avec la famille.»