?Hier Marcel Groleau alarmait ses membres et lecteurs, dans le journal du syndicat qu’il préside, face au danger menaçant des compagnies qui réalisent des investissements dans les terres agricoles. L’accaparement des terres revient donc dans l’actualité.
Partenaires Agricoles II inc, l’une de ces sociétés spécialisées dans le domaine vient d’annoncer le 17 octobre dernier une émission d’actions ordinaires d’un montant maximal de 50 millions $. Et Pangea, la compagnie de Charles Sirois a fait encore récemment la manchette en regard de son intérêt pour des terres du Kamouraska. La Vie Agricole a rejoint l’un des hommes au cœur de ce développement : Clément C. Gagnon, président et co-fondateur de Partenaires Agricoles, une société dont la mission est, dit-il, d’assurer la pérennité de la culture des terres agricoles du Québec. Il a accepté de lever le voile sur une toute autre réalité selon lui. Il est en parfait désaccord avec le président de l’UPA.
“ Fondamentalement, la relève est un problème préoccupant dans l’industrie agricole comme dans l’industrie financière ou tout autre secteur de l’économie québécoise. Seul le secteur informatique est épargné. Le problème est que depuis quelques mois la relève agricole a pris une place médiatique importante et que l’analyse est faussée par L’UPA qui par son discours défend ses entrées de fonds. Il défend ses membres, certes, mais il se défend aussi surtout lui-même !“. M. Clément C.Gagnon ne comprend pas la cabale permanente de L’UPA dans ce dossier contre les investisseurs qui veulent aider la relève. L’UPA, à en croire les propos de M. Gagnon chercherait donc avant tout à continuer de financer son organisation qui lui permet de contrôler le financement et le discours de l’agriculture au Québec.
M. Gagnon rappelle que la société qu’il gère se veut bénéfique à la relève agricole. “On propose parfois des achats à 100 % lorsqu’il n’y a vraiment pas de relève sur la ferme, dans quel cas l’agriculteur accompagne le transfert sur 3 ans et le personnel attaché à la ferme suit, lui aussi, le transfert en embarquant sur la paye de notre société. Mais nous privilégions des achats à 50-50 afin que les deux groupes (les investisseurs et l’agriculteur) aient un pouvoir équivalent.“ de nous dire M.Gagnon.
Parfois, comme dans un cas qu’il nous cite sans dévoiler le nom réel de la personne en cause, le jeune de 40 ans peut avoir de très bon profits (plus de 400 000 $ net selon l’exemple exposé par le président de Partenaires Agricoles) mais de la difficulté avec sa trésorerie en lien à des investissements trop lourds, lui causant un endettement trop élevé. La société Partenaires Agricoles propose alors d’intervenir à 50-50 et si l’agriculteur ne peut pas dans l’immédiat atteindre ce niveau d’actionnariat, M. Gagnon nous précise qu’une entente à 80-20 est possible mais que l’agriculteur peut par la suite racheter des parts à même les profits qu’il dégage avec sa quote-part.
Il nous rappelle que dans son recrutement actuel il cherche des investisseurs qui ont la même philosophie que lui c’est-à-dire le souci du partenariat 50-50. Il pense réaliste de viser un objectif de rendement annuel de plus de 10 % pour les investisseurs
“Sinon les terres qui va les acheter ?“, Clément C.Gagnon
“Il faut s’occuper de l’aspect entrepreneurial de l’agriculture. On a oublié que les agriculteurs sont des entrepreneurs !“de dire M. Gagnon. “Savez-vous qu’au début des années 2000, il y avait 13 475 jeunes de moins de 40 ans, un producteur de 35 ans pour un de 55 ans ? En 2011, il restait un jeune de 35 ans pour trois de 55 ans et seulement 4475 producteurs de moins de 40 ans. Alors quand on me dit que nous ne sommes pas une solution à la relève je ne comprends pas ! Ça prend des sociétés comme nous, absolument ! Les terres qui va les acheter sinon ?“
Plus de terres qu’il n’y a d’investisseurs !
Il précise à La Vie Agricole qu’il est faux de dire que les sociétés comme la sienne, les Pangea ou Agriterra de ce monde, ont investi massivement dans les terres agricoles. Il y a actuellement 115 000 hectares disponibles nous dit M.Gagnon, choqué des affirmations qui circulent comme si on manquait de terres au Québec. Et il rappelle que l’objectif de Partenaires Agricoles est aussi d’acheter 30 % des terres non productives et de les rendre rentables. “Ça prend cela si on veut nourrir la planète et exporter“`, dit-il.
La Caisse de dépôt devrait penser au Québec avant le Brésil !
Il rappelle qu’il faudrait peut-être redéfinir la ferme familiale en expliquant aux néophytes de l’agriculture, qu’en 2014, une ferme familiale peut être détenue en partenariat avec des financiers si elle veut rivaliser dans le marché mondial tel qu’il est. Et il ajoute : “ D’ailleurs les caisses de retraite devraient en faire plus pour sauver les terres québécoises. La Caisse de dépôt au lieu d’investir au Québec investit au Brésil !“s’étonne-t-il !
Quels risques pour les régions ?
Sur le danger que craignent les régions de voir une convergence dans l’achat de semences et d’équipements, Clément C.Gagnon rappelle qu’il veille à ce que des ententes en région soient effectuées à chaque fois qu’il entreprend une transaction avec des agriculteurs, que ce soit pour les intrants ou la machinerie car le concept de l’achat de terres, selon lui, est fait pour justement développer l’économie des régions. Il termine avec cette citation pleine de sens : “ Avec la population tu peux tout, sans elle, tu ne peux rien !“