NDLR : Alors que le dossier de la fiscalité agricole refait surface, que plusieurs producteurs dans les champs commencent à se demander si ce n’est pas Pierre Paradis qui avait raison avec sa réforme administrative du Programme de crédit de taxes foncières agricoles ( PCTFA), il est très intéressant de relire l’extrait de l’entrevue que le ministre des Finances Carlos Leitao donnait à La Vie agricole le 20 avril dernier et de relire des passages de l’analyse du rapport Godbout publiée en mars dernier dans nos pages. La Vie agricole avait mis le doigt sur la problématique dès le printemps dernier : Le plafonnement du PCTFA à 5 %.
Il est clair que malgré l’annonce d’une entente, entre le nouveau ministre Lessard et l’UPA suite au départ de Pierre Paradis, que le dossier n’était absolument pas réglé. Preuve en est qu’aujourd’hui, les producteurs reçoivent des factures et comme le soulevait notre publication tout de suite après l’étude des crédits il est inscrit dans la loi que le budget du PCTFA ne peut augmenter de plus de 5 % par an. Le 23 mars dernier, La Vie agricole analysait le rapport Godbout et écrivait d’ailleurs : «Toutefois les choses ne sont pas si simples que l’espère l’UPA ! L’économiste Luc Godbout est clair : l’opposition forcenée de l’UPA n’a rien réglé puisque le titre du rapport s’intitule : “ La réforme abandonnée, un dossier non réglé!“».
Godbout soulignait dans son rapport des éléments intéressants de la réforme abandonnée: une simplification provenant essentiellement de la réduction du nombre de critères d’admissibilité et le transfert de l’administration du programme à Revenu Québec. Luc Godbout écrivait alors dans son rapport : « On remarque que 40,7% des entreprises auraient vu leur aide varier de moins de 200 $ à la hausse ou à la baisse.»
On comprenait donc que dans la réforme plusieurs entreprises agricoles sortaient gagnantes, mais que de nombreuses entreprises sortaient perdantes avec une perte « dans plusieurs cas relativement faibles».
Si la variation était de 200 $ à la hausse, à la baisse, on peut penser que le 113 $ en moyenne annoncé par Pierre Paradis n’était pas si loin de la réalité. Beaucoup de foin pour rien et pour tout recommencer !
Extrait de l’entrevue avec Carlos Leitao, ministre des Finances du Québec le 20 avril 2017.
Yannick Patelli : Avec Pierre Paradis vous vouliez une réforme sur le remboursement des taxes. Avec Lessard la réforme a été suspendue. Le retour à l’ancien programme fait en sorte que la responsabilité de celui-ci est retransférée au MAPAQ à nouveau. Le rapport Godbout démontre que rien n’est réglé. Que fera le gouvernement sur la fiscalité agricole au cours des prochaines années ?
Carlos Leitao : « En effet, c’est une grande question et qui n’est pas d’aujourd’hui. C’est une question qui plane depuis un certain temps. Nous, le ministère des Finances, en collaboration avec le MAPAQ, l’année passée, on avait proposé cette réforme qui allait surtout dans la direction de simplifier le régime actuel de taxation foncière agricole. Cette réforme a été contestée par le milieu et le ministre Lessard a décidé de l’annuler. Pour nous le travail a été fait. Une nouvelle réforme devra maintenant être proposée par le ministère de l’Agriculture.»
YP : Était-ce une intention de réforme qui venait du ministère des Finances ou du MAPAQ ?
CL : «Ça venait des deux. On s’était mis d’accord qu’il y aurait deux étapes. La première étape c’était ce que nous avions fait, de simplifier, parce que c’était compliqué. Et là, on revient au programme initial donc ça demeure très compliqué. Rien n’a été réglé ! C’est cher à administrer pour nous, et pour les agriculteurs, et pour les municipalités. On avait donc proposé cette solution-là qui a été très contestée par le milieu. La deuxième étape il faudra revoir avec les municipalités et le milieu agricole comment on pourra arriver à une véritable réforme de la taxation agricole et municipale. Là, on revient à la case départ.»
YP : Il faut donc s’attendre à de nouvelles négociations ?
CL : « Et là, ce dossier sera mené par le ministère de l’Agriculture.»
YP : Sans réforme ce programme est un puits sans fond avec la valeur des terres qui continue d’augmenter, comment sortir de cette impasse ?
CL : « Nous, aux finances c’est plafonné !»
YP : La loi sur le remboursement des taxes agricoles prévoit effectivement une augmentation maximale du programme de 5 %, mais cette année dans le budget dévoilé, c’est 18 %. Si le 18 % est attribuable aux perdants suite à l’abandon de l’ancien programme, ces perdants seront-ils compensés les années subséquentes aussi ?
CL : « Bonne question à laquelle il n’y a pas de réponse définitive. Pour cette année oui, on s’est engagé à le faire donc on va le faire, mais les années subséquentes ça va être discuté entre le ministère de l’Agriculture et le Trésor.»
YP : Il y aura donc des négociations enclenchées dans les prochains mois ?
CL : « Oui, mais encore là ce seront des dossiers qui seront menés par le ministère de l’Agriculture. »