À quand la gestion de l’offre 2.0? Nos agriculteurs méritent mieux qu’un simple chèque pour acheter leur silence !

Onze pays membres nous ont réservé une surprise en signant le Partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP), remplaçant ainsi le défunt Partenariat transpacifique. Ce nouvel accord pourrait être ratifié dès le début du mois de mars par le Canada, le Japon, le Mexique, l’Australie, Brunei, le Chili, la Malaisie, la Nouvelle-Zélande, le Pérou, Singapour et le Vietnam. Un an après le retrait des Américains de l’accord original, contre toutes attentes, un corridor d’échanges commerciaux émergera au cours des années à venir entre deux régions du globe. 

Malgré les inquiétudes liées aux négociations actuelles de l’ALÉNA, ce nouvel accord offrira une belle occasion à plusieurs filières agricoles et principalement aux secteurs de l’industrie bovine, porcine et des fruits de mer. D’ici 2015, Ottawa souhaite exporter des produits agroalimentaires totalisant une valeur de plus de 75 milliards dollars. Atteindre cette cible sans bénéficier d’accords comme celui-ci relèverait du miracle.

Ainsi, le Premier ministre Trudeau honore le travail de l’ancien gouvernement conservateur en allant de l’avant avec un accord ayant le potentiel de bouleverser le commerce international pour les années à venir. L’objectif premier de l’accord original voulait unir le Japon et les États-Unis pour miner l’émergence économique de la Chine. Avec la signature du nouveau pacte à Tokyo, qui exclut les Américains, le PTPGP, ou mieux connu comme le PTP 2.0, les objectifs ont été redéfinis quelque peu. Essentiellement, l’intention des onze pays veut développer un corridor commercial pour plusieurs années en attendant que les Américains se réveillent et réalisent à quel point les accords multilatéraux peuvent aider l’économie mondiale.

En revanche, tout comme l’entente Canado-Européenne, le nouveau pacte crée une nouvelle brèche dans notre système de la gestion de l’offre et selon certaines sources, il permettra aux partenaires d’importer des quantités importantes de produits laitiers, de volailles et d’œufs. Ces filières, qui ont tant bénéficié de notre régime protectionniste de quotas et de tarifs à l’importation depuis des années, vivront un grand bouleversement d’ici peu de temps.

Ces secteurs ne sont cependant pas prêts à céder quoi que ce soit. Pendant que le gouvernement fédéral signe des ententes qui affaiblissent la gestion de l’offre, personne ne se préoccupe d’offrir une vision ou une stratégie de rechange aux secteurs affectés. Ottawa leur offrira vraisemblablement des milliards de dollars en compensation et saupoudrera quelques solutions purement temporaires. Mais le problème reste réel.

Prenons le lait en exemple. Le coût pour produire du lait au Canada est pratiquement deux fois plus élevé qu’aux États-Unis. Des 11 000 fermes laitières qu'il nous reste, peu surviraient à un marché plus ouvert. Le PTPGP permettra la cession de quelque 3,25 % de quotas d'importation supplémentaires. Cela correspond à la production annuelle de 357 de nos fermes laitières, dont nous n’aurons plus besoin d’ici quelques mois. Cela se traduit par plus de 250 millions de revenu en moins pour nos producteurs agricoles. Cette somme n’inclut pas outre mesure les pertes dans le secteur de volaille et œufs. C’est pratiquement le double de la brèche créée par l’entente Canado-Européenne. 

Mais pendant que l’Union des producteurs agricoles du Québec milite pour ses membres et s’obstine à ne pas faire quand chose pour les préparer à un marché plus ouvert, nos producteurs s’inquiètent avec raison. La plupart d’entre eux opèrent sous le couvert d’entreprises familiales en région et se demandent ce que la mondialisation réserve pour la prochaine génération. Personne n’ose discuter d’une version 2.0 de la gestion de l’offre qui moderniserait nos secteurs, personne. Nos producteurs agricoles comprennent que le monde change et qu’un ajustement s’impose. Une feuille de route qui permettrait à l'industrie de devenir compétitive est loin d’être assurée. Le Canada a une chance inouïe d’offrir des produits de première qualité au reste du globe, mais il faut d’abord une stratégie. Pour l’instant, les secteurs assujettis par la gestion de l’offre s’en tiennent à l’hypocrisie de la classe politique canadienne et à l’entêtement des leaders du domaine agricole.

En somme, depuis quelques années, Ottawa tente de positionner le Canada comme un joueur crédible à l’international et c’est tant mieux. Pour le domaine agroalimentaire cependant, il nous faut une nouvelle mouture pour la gestion de l’offre. Nos agriculteurs méritents mieux qu'un simple chèque pour acheter leur silence.

 

 

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