Le débat entourant l’étude par Santé Canada pour l’approbation de nouvelles utilisations de pesticides m’a laissé perplexe. Non pas sur le bienfondé des demandes, mais plutôt concernant le traitement que l’on a fait de cette nouvelle, ainsi que la place de plus en plus grande des anti-pesticides dans le débat. Les arguments avancés pour rejeter cette révision couplée à un silence à la limite de l’arrogance de la part de Santé Canada a fait dérailler un processus qui est probablement un des plus sécuritaires au monde en ce qui a trait à l’approbation de l’utilisation de pesticides. Au final le politique a dû s’en mêler.
Au Canada, le processus pour faire approuver de nouveaux pesticides ou de nouvelles utilisations de pesticides existants est un chemin long et ardu. Les demandeurs doivent déposer des dossiers et des études scientifiques qui doivent être sans faille, pour être ensuite passés par un processus de consultations et d’analyses. Plusieurs ont laissé entendre que les études étant déposées par l’industrie pour appuyer les demandes étaient biaisées et que cela devrait être la responsabilité des gouvernements de les faire. C’est mal connaitre le système d’approbation canadien, plus les études scientifiques sont faites par des équipes crédibles (aux yeux des Santé Canada) plus votre demande peut se faire approuver. Le processus est assez sévère et d’ailleurs plusieurs le trouvent trop sévère et trop couteux, limitant l’approbation de nouvelles molécules pour lesquelles le marché potentiel canadien n’est pas suffisamment important pour justifier les couts des démarches auprès de Santé Canada.
Dans le débat sur les pesticides, il est assez navrant de voir l’utilisation de la science par certains groupes anti-pesticides qui diabolisent systématiquement la science et les arguments en faveur d’un pesticide. L’objectif de ces groupes c’est l’élimination pure et simple des pesticides, sans égard aux tactiques employées et aux conséquences.
L’utilisation des pesticides fait partie de nos pratiques agricoles
L’utilisation des pesticides fait partie de nos pratiques agricoles. L’autre jour je me promenais dans une belle région agricole du centre du Québec, toutes les terres y sont bien cultivées, la plupart en maïs ou en soya, quelques cultures fourragères à travers, la plupart étant faite en production conventionnelle c’est-à-dire avec l’utilisation de pesticides.
J’essayais de m’imaginer qu’est-ce que cela aurait l’air sans pesticides ! À l’échelle du Québec l’on redeviendrait un importateur de grains et de soya, et à l’échelle mondiale l’on connaitrait une pénurie importante de céréales. Tout ce qui est produit actuellement est consommé, l’écart entre la production et la demande des céréales est très faible, et cet écart est de plus en plus faible et incertain et les changements climatiques n’aideront pas. De penser que l’on pourrait se passer de pesticides demain matin est une folle utopie.
Il doit y avoir un débat !
Il doit y avoir un débat sur les pesticides, un rapport préparé par le gouvernement du Québec[1] le mentionne : ‘’Les demandes de la population pour une production de grains plus responsable continuent de s’accentuer, notamment pour la réduction des risques liés à l’usage des pesticides. Plusieurs améliorations ont été notées au cours de la période 2014-2018. Toutefois, d’autres défis de taille demeurent, dont une meilleure gestion des fertilisants, l’amélioration de la santé des sols, l’adaptation aux changements climatiques, la réduction des gaz à effet de serre, etc.’’.
Malheureusement le débat actuel est monopolisé et contaminé par des groupes idéologistes voir extrémistes, rien pour entamer un virage vers une nouvelle agriculture qui doit répondre à des objectifs d’autosuffisance. Afin de rééquilibrer le débat, il serait peut-être temps que Santé Canada et Agriculture Canada améliorent leur communication et expliquent comment sont approuvés les pesticides au Canada, cela serait un bon début.
[1] Portrait-diagnostic sectoriel de l’industrie des grains au Quebec, gouvernement du Quebec, 2020