Pour comprendre la situation telle que déclarée par le président d’Agropur, Roger Massicotte, lorsqu’il a avoué exporter plus qu’il ne faudrait les surplus de lait écrémé hors du système de la gestion de l’offre, nous avons demandé à Richard Ouellet, juriste et professeur titulaire en droit international économique à la Faculté de droit de l’Université Laval à Québec qu’elle est sa lecture de la situation.
Nous lui avons demandé si Agropur est en défaut. Au premier abord il reconnait que la situation fait débat puisque certains, dont Maurice Doyon, sont venus à la défense d’Agropur.
Il nous explique : «L’enjeu, c’est qu’est-ce qui est illégal ? On parle là de l’annexe 3a3, une partie de l’accord qui régit les produits envoyés vers d’autres destinations. C’est sûr que les Américains n’aiment pas la gestion de l’offre, mais ils ne cherchent pas à la saborder et ils disent en fait : ‘’ on va accepter que vous vous mettiez à l’abri de l’importation, mais pas en profitant de l’exportation, par contre si vous dépassez les plafonds discutés vous devez vous imposer des droits à l’export’’, et c’est ce qui se passe avec le lait écrémé en poudre inclus dans cette entente.».
Ça contrevient à l’esprit de l’accord
«Ce qui est sûr c’est que ça contrevient à l’esprit de l’accord», ajoute M.Ouellet.
Quand Maurice Doyon dit ‘’Agropur ne triche pas vraiment’’, il faut se rappeler, dit-il, que « Si l’accord c’est de se plafonner, alors, ou bien il faut revoir l’accord ou bien alors il y a litige!».
Quand nous lui demandons ce qu’il se dirait s’il était juriste pour les Américains, sa réponse est claire : « Il y a infraction».
L’engagement du Canada
M.Ouellet rappelle que le Canada dans l’entente qu’il a prise avec les États-Unis et le Mexique s’engage à 3 choses
- Accepter un plafond de 35 000 tonnes à l’exportation
- Payer des droits à l’exportation de 0,54 cent le litre s’il y a dépassement
- Prévenir les Américains et leur dire où se font les exportations
Apparemment rien de cela ne semble respecté par Agropur à l’écoute de la vidéo du président Massicotte.
La quantité de surplus de lait écrémé envoyé hors système annoncée par le président d’Agropur est «énorme» soutient M.Ouellet et il estime que M.Massicotte a été bien trop «candide».
«‘’Ça se peut que je triche’’, voyons, on ne fait pas ça !», s’exclame-t-il.
«Après ça plus personne ne voudra donner ses chiffres», nous dit-il et «Et si on a toujours fait cela au Canada, pourquoi s’en vanter auprès de ses membres ?» ajoute-t-il.
Le secret de la recette ?
Pour Richard Ouellet, la recette est sensiblement la même que pour importer du lait diafiltré. « C’est pareil pour ce qu’on importe ou ce qu’on exporte. Ça passe aux douanes sous un autre numéro tarifaire et ça contrevient à l’esprit de la règle qu’on s’est donnée. On en revient au débat autour de la classe 7. C’est pareil. Il faut respecter la règle sinon il y a des surdroits», de conclure le professeur.
Bv : Richard Ouellet
Crédit-photo : Université Laval