Comme beaucoup de gens le savent, depuis l’entrée en vigueur de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles (ci-après nommée la « LPTAA »), il est désormais interdit d’utiliser à des fins autres qu’agricoles un lot situé en zone agricole, et ce, à moins d’avoir obtenu au préalable l’autorisation de la Commission de protection du territoire agricole du Québec (ci-après nommée la « CPTAQ ») ou d’être en mesure de se prévaloir d’une des quelques exemptions prévues à la LPTAA.
Une de ces exemptions concerne notamment les droits acquis. En effet, la LPTAA prévoit que tout propriétaire d’un immeuble qui était utilisé ou faisait l’objet d’un permis d’utilisation à des fins autres qu’agricoles avant la mise en application de la LPTAA peut bénéficier de droits acquis lui permettant ainsi de poursuivre une utilisation autre qu’agricole, et ce, bien que son lot se trouve en zone agricole. De ce fait, le propriétaire d’un lot bénéficiant de droits acquis pourra aliéner, lotir et utiliser un tel lot à des fins autres qu’agricoles sans devoir préalablement obtenir une autorisation de la CPTAQ.
Notons que les droits acquis s’appliquent sans qu’aucune demande n’ait à être soumise à la CPTAQ. En effet, ce n’est qu’au moment de l’émission d’un permis de construction ou lors de l’aliénation d’un lot, qui aurait pour effet de délimiter totalement ou partiellement une superficie d’un droit acquis, qu’il devient nécessaire de faire reconnaître l’existence de ces droits acquis par le biais du dépôt d’une déclaration à la CPTAQ.
Or, il est primordial de savoir que le dépôt d’une telle déclaration à la CPTAQ n’est pas sans conséquence. À cet égard, il faut souligner avant toute chose que la LPTAA permet d’étendre la superficie sur laquelle porte un droit acquis. En effet, dans le cas d’un usage résidentiel, cette superficie pourra être portée à 5 000 m2 et à 10 000 m2 dans le cas d’une utilisation à des fins commerciales. Or, toute déclaration à la CPTAQ d’une superficie inférieure aux limites prévues de 5 000 m2 en matière résidentielle, ou de 10 000 m2 en matière commerciale, revêt un caractère permanent, de sorte que la superficie ainsi déclarée ne pourra plus jamais être majorée par la suite. Qui plus est, il importe de savoir que le dépôt à la CPTAQ d’une déclaration de l’existence d’un droit acquis a pour effet de « cristalliser » l’emplacement de la superficie ainsi déclarée. Dès lors, il devient impossible de déplacer ou encore transférer la superficie visée.
De plus, il est à noter que depuis le 21 juin 2001, il est désormais impossible d’ajouter une nouvelle utilisation principale à des fins autres qu’agricoles sur la superficie d’un lot bénéficiant de droits acquis ou encore d’en modifier l’utilisation existante sans avoir préalablement obtenu l’autorisation de la CPTAQ.
Par ailleurs, il faut savoir que le fait de laisser sous couverture végétale pendant plus d’une année la superficie sur laquelle porte un droit acquis a pour effet irrémédiable d’éteindre ce droit acquis. Toutefois, à cet égard, la Cour d’appel du Québec a reconnu que, dans l’éventualité où un lot bénéficiant de droits acquis présentait d’ores et déjà une couverture végétale tout en étant utilisé à des fins autres qu’agricoles, les droits acquis y demeureraient, et ce, tant et aussi longtemps qu’il n’y aura pas de cessation ou de modification de l’usage dérogatoire qui est fait du lot.
En terminant, il est intéressant de noter que la LPTAA n’empêche pas la construction de plus d’une résidence sur un lot bénéficiant de droits acquis sous réserve de la réglementation municipale applicable qui comporte quant à elle souvent de nombreuses conditions pouvant faire échec à un tel projet de construction
Maxime Lauzière, avocat, Bernier/Fournier