
Trente-cinq de demandes d’autorisation, de refus, d’appels, de re-refus, d’ordonnances et d’amendes n’ont pas suffi. Seule maintenant une démolition peut mettre fin aux activités illégales du méga centre de divertissement pour urbains établi sur les meilleures terres du Québec à Mirabel, en contravention spectaculaire de la Loi de protection du territoire et des activités agricoles (LPTAA), sous couvert d’agrotourisme.
L’Institut Jean-Garon réagi avec force et indignation au reportage de Radio-Canada, diffusé le 9 février dernier, sur les activités de la Sucrerie Bonaventure de Mirabel. Cette entreprise agricole opère, aux côtés de ses terres en culture de 700 hectares, un club de golf, un stade pour rodéo, une salle de réception-cabane à sucre de 1000 places et une micro-brasserie-restaurant de 400 places, le tout sur des terres agricoles de catégorie 3, les meilleures et les plus rares au Québec.
Il s’agit d’une perversion dangereuse du concept d’agrotourisme qui, si elle n’est pas freinée, pourrait voir des conséquences désastreuses sur le potentiel nourricier des terres en périphérie de Montréal. Le dossier similaire de la salle de spectacle érigée sans autorisation par le chanteur Mario Pelchat dans son vignoble de Saint-Joseph-du-Lac montre l’ampleur de ce phénomène.
L’impuissance de la CPTAQ
Selon le co-président de l’Institut, M. Guy Debailleul, cette saga judiciaire amorcée en 1989 montre toute l’impuissance de la Commission de protection du territoire agricole (CPTAQ) à remplir son mandat dans l’état actuel de ses pouvoirs et de ses ressources.
Ce ne fut pas toujours le cas, rappelle M. Debailleul. En 1979, la jeune commission a en effet fait démolir un aréna en construction à Contrecoeur par le tout-puissant syndicat FTQ de Sidbec-Dosco. Qu’est-ce qui explique l’écart entre cette rigueur et le laxisme actuel sinon un manque de volonté politique de donner à la CPTAQ des moyens à la hauteur de ses responsabilités, se demande l’Institut.
Le test du projet de Loi 86
Le reportage de Radio-Canada arrive quelques jours avant le début de l’étude article par article du Projet de loi 86 visant à assurer la pérennité du territoire agricole et sa vitalité. Ce sera un test important estime M. Debailleul car, d’une part, le projet de loi donne à la Commission plus de dents mais pas nécessairement plus de moyens.
Est-ce que la loi, une fois adoptée, permettra à la Commission non seulement de faire cesser la destruction du territoire agricole sous couvert d’agrotourisme mais aussi de faire remettre les lieux en leur état initial? Comme en 1979, un exemple est sans doute nécessaire et pour cela, il faut une loi forte, une Commission avec des moyens et aussi du courage politique.