OPINION: Aller au bout de mes rêves, c’est ce que j’ai décidé de faire lorsque j’ai pris la décision de retourner aux études à l’âge de 30 ans. Après avoir réalisé un baccalauréat en agronomie, une maîtrise en sciences animales et après avoir cumulé plusieurs années d’expérience comme agronome consultante en nutrition animale, j’ai décidé de faire le grand saut et de me lancer dans un milieu qui me passionne, un milieu qui a besoin d’aide : la médecine vétérinaire.
Toutefois, même si le monde vétérinaire au Québec vit une importante crise de main-d’œuvre, les candidatures déposées à l’Université de Montréal (UdeM) pour la médecine vétérinaire ont du mal à franchir le filtre du registraire. Certaines candidatures n’atteindront même pas leur objectif, soit d’être déposées à la Faculté de médecine vétérinaire (FMV) de Saint-Hyacinthe. Pour des personnes comme moi, candidates avec un parcours atypique, entrer en médecine vétérinaire est mission impossible.
Pourtant, le besoin de main-d’œuvre est criant. Les professionnels en place sont fatigués et les coupures de services se font sentir partout dans la province, et ce, dans tous les secteurs, mais plus particulièrement dans le secteur des grands animaux. De plus, nombreux sont les vétérinaires à bout de souffle qui malheureusement quittent la profession, tel que rapporté
par le reportage de La semaine verte du 8 avril 2023.
De mon côté, mes demandes d’admission ne passent même pas le filtre administratif du registraire. Le personnel de la FMV me répond qu’il est conscient que le système en place ne fonctionne pas et qu’il passe à côté de bonnes candidatures comme la mienne, mais qu’il ne peut rien faire. La Faculté me propose toutefois d’aller faire une année d’étude dans une école
hors Québec qui possède les mêmes accréditations que celles de Saint-Hyacinthe, dans le but de déposer une demande de transfert, et d’entrer en 2e année au programme de médecine vétérinaire. Cette solution me permettrait de passer le filtre du registraire de l’Université de Montréal et de faire atterrir ma candidature directement à la Faculté pour qu’elle soit évaluée par un comité de sélection.
Enfin, un peu d’espoir!
Je dépose alors ma demande d’admission à Ross University School of Veterinary Medicine à l’hiver 2021, une université privée reconnue où 300 vétérinaires sont formés annuellement. Je suis acceptée à la première ronde. Les critères d’admissions ? Mes résultats scolaires, certes, mais aussi mes références, mes motivations, mon expérience et ma connaissance du milieu vétérinaire.
Pleine d’espoir, j’écoute toutes les recommandations de l’UdeM. Toutefois, cette aventure vient avec plusieurs sacrifices humains et financiers : je dois quitter mes proches, m’expatrier et m’endetter. À ce jour, j’ai contracté des prêts pour des droits de scolarité qui s’élèvent à 128 000 $. Mes efforts portent fruit, après 3 sessions d’études au doctorat en médecine
vétérinaire à Ross, tout en assurant la gestion à distance des trois entreprises que j’ai démarrées au Québec, j’obtiens une GPA (Grade point average) de 3,92/4,0, ce qui équivaut à une moyenne de 98 % dans tous mes cours. Bingo ! Je dépose ainsi ma demande de transfert pour accéder au programme de Médecine vétérinaire de l’UdeM.
Verdict : refusée.
Ma candidature est mise de côté par le registraire de l’Université de Montréal sous motif que les notes que j’ai obtenues lors de la réalisation de mon baccalauréat en agronomie, il y a 10 ans, ne font pas le poids. Cela veut donc dire que mes 3 sessions réalisées à l’étranger dans une autre université ayant les mêmes accréditations n’ont aucune importance ? Vous me dites
qu’ici, au Québec, on évalue les dossiers uniquement sur les notes obtenues il y a 10 ans ? Or, on pardonne des casiers judiciaires et des faillites après 7 ans… À quand une révision des méthodes de sélection qui permettront de choisir les candidats non pas seulement en fonction d’une cote théorique, mais en fonction de leur expérience, de leurs connaissances
du milieu vétérinaire, de leur orientation professionnelle et de leur motivation ?
Le Québec peut-il vraiment se permettre de laisser de côté des talents en raison d’un système rigide et sans considération ? Le milieu vétérinaire est en crise et dans tous ces dédales administratifs, a-t-on pensé à la santé et au bien-être des grands animaux ? Certains souffrent, d’autres décèdent faute de soins vétérinaires.
Madame la Ministre, j’ai même contacté le bureau de mon député M. Donald Martel et on m’a également répondu qu’on ne peut rien faire.
Madame la Ministre, est-ce possible d’intervenir et d’offrir au Québec une vétérinaire qui pourra prêter main-forte aux autres vétérinaires qui en arrachent et aider les animaux dans le besoin ?
Madame la Ministre, s’il vous plaît, commettez-vous.
D’une étudiante fatiguée et découragée qui doit s’expatrier à l’autre bout du monde afin d’obtenir la formation nécessaire.
Rachèle Tremblay, agr. M.Sc