Olymel : De boulet à bouée de sauvetage

En un an, Olymel sera passé du statut de boulet à celui de bouée de sauvetage pour le géant coopératif Sollio. Le déficit de la plus importante filiale de Sollio qui était de 446 M$ en 2022 s’est en effet transformé en un profit de 138,3 M$ en 2023, un redressement spectaculaire de près de 600 M$.

Lors d’une conférence de presse tenue en marge de l’Assemblée générale annuelle de Sollio, le 29 février dernier, le PDG Yanick Gervais a tenté d’expliquer ce revirement. Outre l’excellente performance du secteur de la volaille, très important chez Olymel, il mentionne la baisse du prix des céréales, principale composante du coût de production du porc, la performance des coupes à valeur ajoutée, bacon et autres, et une certaine réouverture du marché chinois.

Mais les vraies raisons sont à chercher du côté négatif de l’équation: fermeture de six usines, perte de 1 500 emplois, réduction des cheptels de 855 000 porcs, nouvelle convention de mise en marché demandant un sacrifice de 40 $ par porc aux éleveurs en 2023.

Bref, une consolidation douloureuse qui a créé une énorme pression sur la filière, pression qui de l’aveu même de M. Gervais se poursuit : la journée même de l’Assemblée générale, l’écart entre le prix du porc à Chicago et celui payé par Olymel était d’environ 40 $ par tête. Il s’agit d’un avantage pour Olymel « acheteur de porc », mais une perte pour Sollio « producteur de porc », perte il est vrai compensée en grande partie par l’Assurance stabilisation des revenus agricoles (Asra).

À cet égard, M. Gervais ne s’est pas avancé sur le montant de compensation reçu de l’Asra, se contentant de mentionner une moyenne de 10 M$ par année depuis cinq ans. Pour mémoire, mentionnons que l’Asra a versé en 2023 des compensations de 39$ par porc et de 447$ par truie en production. Sollio, de loin le plus gros joueur du secteur, a produit l’an dernier quelques 2,8 millions de porcs, sans compter ceux engraissés pour elle par des éleveurs intégrés, et avait en octobre dernier quelque 60 000 truies dans ses maternités.

Le montant final des compensations que la grande coopérative pourra recevoir en tant que producteur de porcs est encore un secret bien gardé, mais il devrait dépasser largement les 100 M$.

Pour l’avenir

La haute direction de Sollio estime que le plan de redressement dans le porc, tout douloureux qu’il soit, porte ses fruits : retour à la rentabilité, réduction de 50% de la dette à long terme et, faute de ristourne proprement dite, rachat pour 28 M$ de parts achetées par les producteurs pour refinancer leur coopérative dans les moments difficiles.

Interrogé sur l’avenir d’Olymel, M. Gervais assure que le pire est passé et qu’il n’est plus question de fermeture ni de liquidation d’actifs. Mais est-ce qu’un modèle de production qui a besoin trois années sur quatre des compensations de l’Asra est viable à moyen et long terme? Rappelons qu’on estime ces compensations à 1,5 milliard $ entre 2010 et 2023.

Nous aurions aimé poser la question au ministre André Lamontagne qui prenait la parole devant l’Assemblée générale après la conférence de presse, mais cette rencontre s’est déroulée à huis clos.

 

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