Au-delà du fait que de nombreuses critiques pleuvent sur Agropur concernant ses idées de grandeurs avec son siège social inspiré de la Silicon Valley, on notera que la situation financière de la compagnie n’est pas non plus l’occasion de se réjouir malgré ses résultats positifs de la dernière année. Elle sera amenée à payer ses dettes sur des parts privilégiées à des taux aussi élevés que 9 %.
On savait déjà que la coopérative vit certaines difficultés et détient un siège social pour lequel elle cherche à louer au moins 30 % des espaces. Certaines sources qui nous ont contactées disent même que ce sera au final plus de 30% qui seront proposés en location. Évidemment Agropur vit l’effet pandémie et télétravail comme tout le monde mais certains producteurs qui nous ont parlé ne comprennent pas pourquoi ceux qui étaient en charge de ce développement ne sont pas tenus responsables. «Où est l’imputabilité ?», s’étonnent-ils.
Des doutes s’expriment
Les producteurs depuis la fin de l’année passée nous écrivent aussi pour se plaindre des parts coopératives qui ne sont pas remboursées même s’ils quittent la production. C’est à nouveau le cas ce mois-ci avec la lettre de la Ferme Ammerlaan ( à lire dans l’édition de février). D’autres se demandent tout simplement au regard du dernier rapport annuel d’Agropur si les producteurs du Québec ne se trouvent pas à payer pour les activités d’Agropur aux États-Unis.
Ce qui saute aux yeux et étonne même les plus fidèles de la coopérative laitière ce sont les parts privilégiées qui sont rémunérées à des taux qui semblent bien exorbitants à une époque où rien n’est plus simple que d’emprunter pour moins de 2 %.
«Quand l’argent ne vaut rien, comment se fait-il que de bons gestionnaires soient amenés à payer presque 10 % en taux d’intérêt», disent les membres de la coopérative. «Quelles situations ont ainsi mené Agropur à se retrouver dans une incapacité au point d’engranger tant de dettes ? Est-ce l’impact des achats massifs chez nos voisins du sud ?», se demandent certains producteurs estomaqués de ne pas être restés «la priorité» de la coopérative.
Ça urge de rembourser !
Effectivement au regard des états financiers déclarés au 31 décembre, on pourrait dire que ça urge de rembourser à la vue des taux d’intérêt pratiqués sur les parts privilégiées.
À la page 67 du rapport d’Agropur, on y déclare que «le 17 décembre 2014, la coopérative a émis 4 700 000 parts privilégiées de premier rang, série 1, d’une valeur nominale de 100 $ chacune, pour une considération en espèces de 470 000 000 $. Ces parts donnent droit à un dividende minimum cumulatif annuel de 5,90 % de la valeur nominale, payable semi annuellement sur déclaration du conseil d’administration. Elles n’ont pas de date de maturité et peuvent être rachetées, en totalité ou en partie, sur décision du conseil d’administration selon certaines modalités depuis le 1er avril 2017. À compter du 1er avril 2022, une majoration du taux du dividende semestriel entre 1,25 % et 3,50 % sera applicable si ces parts n’ont pas été rachetées.»
Rebelote le 16 décembre 2015 :«La coopérative a émis 3 000 000 parts privilégiées de premier rang, série 2, d’une valeur nominale de 100 $ chacune, pour une considération en espèces de 300 000 000 $. Ces parts donnent droit à un dividende minimum cumulatif annuel de 6,55 % de la valeur nominale, payable semi annuellement sur déclaration du conseil d’administration. Elles n’ont pas de date de maturité et peuvent être rachetées, en totalité ou en partie, sur décision du conseil d’administration selon certaines modalités depuis le 1er avril 2019. À compter du 1er avril 2026, une majoration du taux du dividende semestriel entre 1,50 % et 4,00 % sera applicable si ces parts n’ont pas été rachetées.»
Des questions restent en suspend : les surplus futurs fonderont-ils toujours dans les dettes du futur ? Y a-t-il anguille sous roche et risque-t-on de voir venir une démutualisation de la coopérative dans les prochaines années ? Est-ce la fin des ristournes dans les années à venir au profit des détenteurs des parts privilégiées ? Voilà la question centrale que se posent les producteurs membres !
Au moment de publier, Agropur n’avait pas encore répondu à nos questions.