Dans le porc, un plan conjoint à deux vitesses?

Avec la décision de la Régie des marchés agricoles, Olymel peut aller de l’avant avec son plan de réduction d’abattage de 750,000 porcs par an, 530,000 porcs provenant de fermes du Québec, la balance en provenance de l’Ontario. Cette réduction devra se faire au Québec auprès des fermes produisant des « porcs de proximité », épargnant si l’on peut dire les porcs sous propriété ou sous entente particulière avec Olymel. Cette décision affaiblit un plan conjoint qui protège de moins en moins les producteurs indépendants et favorise de plus en plus un modèle de production intégrée à un seul joueur.

Cette situation place Les Éleveurs de porcs du Québec dans une position délicate : ils doivent dans un premier temps trouver un marché pour les porcs excédentaires qui sont dans les élevages, et ensuite voir s’ils peuvent les placer de façon plus permanente. On parle ici de tout un défi : replacer 530,000 porcs ailleurs que chez le principal transformateur du Québec, Olymel, qui contrôle 80 % de l’abattage au Québec et qui a une capacité d’abattage déclarée de 9.6 millions de porcs, plus que la production de 7,000,000 de porcs du Québec.

Un grand principe remis en cause

Certains évoquent la vente de porcs vivant vers les États-Unis, une solution qui remettrait en question un des grands principes de l’entente entre acheteurs et producteurs, comme quoi tous les porcs du Québec doivent être transformés au Québec. Ce principe a d’ailleurs coûté cher aux producteurs et aux gouvernements, car lorsqu’il y avait des surplus ici et que les prix baissaient plus rapidement, le système de l’ASRA intervenait et l’on préservait les emplois de toute la filière. La contrepartie de cette exclusivité n’existait pas, ou du moins est assez difficile à comprendre puisque les acheteurs n’avaient pas l’obligation d’acheter exclusivement du porc québécois.

Un autre grand principe, à la base du plan conjoint : tous les porcs sont égaux aux portes de l’abattoir, et bien ce n’est plus vrai!

Il y a les porcs de proximité (quel beau nom trompeur), les porcs du propriétaire (de l’abattoir) et les porcs sous une entente particulière (de l’abattoir). Avec le temps, la très grande majorité des porcs produits au Québec sont des porcs du propriétaire et des porcs sous ententes particulières, d’ailleurs je serais curieux de savoir quelle est la proportion de porcs de proximité, un chiffre difficile à obtenir, je dirais moins de 20%.

Lorsqu’il y a coupure, comme le cas présent, les Éleveurs de porcs du Québec ne gèrent que les porcs de proximité, chaque abattoir gère ses porcs propriétaires et ses porcs sous ententes comme il veut, laissant à la porte de l’abattoir les porcs de proximité et le problème aux Éleveurs de porcs du Québec.

Avec un quasi-monopole de l’abattage, plus aucun principe ne tient!

Avec un abattoir qui a un quasi-monopole dans l’abattage et qui contrôle la majorité des porcs en production, les principes passés des ententes entre acheteurs et vendeurs ne tiennent plus. Il est plus que temps que les Éleveurs de porcs s’affranchissent (s’il n’est pas trop tard), et en ce sens, la vente de porcs vivants à l’extérieur du Québec par l’agence de vente est un bon début.

Plusieurs questions se posent, bien entendu il serait bon de connaitre :

  • Quelle proportion des porcs de proximité cette coupure de 530,000 porcs va toucher ?
  • Combien de porcs du propriétaire ou sous ententes particulières cela va-t-il toucher? (probablement 0, mais laissons les abattoirs nous le dire)
  • Qui va payer pour la disposition de ces porcs en surplus ?(transport vers d’autres provinces ou vers les États-Unis)
  • Est-ce que c’est un pool qui inclut l’ensemble des porcs produits au Québec ou uniquement le pool des porcs de proximité?

L’État interviendra-t-il auprès de tous?

Autre question, plus difficile, si cette disposition de ces 530,000 porcs entraine une baisse de prix du porc, est-ce que les porcs du propriétaire et les porcs sous ententes seront compensés s’il y a une intervention de l’État pour compenser la chute du prix de pool ?

De façon plus large, face à un monopole comme Olymel, qui est acheteur et producteur en même temps, n’est-il pas temps d’exclure du plan conjoint les porcs du propriétaire et les porcs sous entente, cela faciliterait la gestion et clarifierait la position de chaque partie et faciliterait probablement le travail de la Régie.

N’oublions pas que « le plan conjoint est un outil qui permet aux Éleveurs de porcs du Québec de négocier collectivement les conditions de mise en marché de leur produit ». (Paragraphe copié du site internet des Éleveurs de porcs du Québec)

Et pour finir, un paragraphe trouvé sur le site d’Olymel, « choisir le porc Olymel, c’est adhérer aux valeurs d’intégrité, de respect et de confiance. Ces valeurs qui animent nos producteurs comme la famille Tremblay, producteurs de porcs de père en fils, soucieux du bien-être de leurs animaux et engagés dans leur communauté. ».

J’aimerais bien savoir ce qu’en pense monsieur Tremblay de tout ça!

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