Sauver Olymel, mais à quel prix?

Oui il faut idéalement sauver Olymel, et certains vous direz même Sollio, la maison mère, qui tremble depuis que le monde du cochon se désagrège. Depuis des mois, La Vie agricole essaye de comprendre ce qui se passe dans le cochon. Pourquoi une industrie indépendante et florissante se retrouve ainsi ratatinée? Et si la cause était le laisser-aller à l’intégration totale! On en a parlé avec Cécilien Berthiaume, producteur de porcs bien connu dans le milieu pour son franc-parler, que l’on a rejoint par téléphone en Floride.

On le sait Jean Garon, l’illustre ministre, a souvent rappelé l’erreur des libéraux d’avoir ouvert les plafonds de l’ASRA ( assurance stabilisation des revenus ) aux intégrateurs alors que celle-ci était réservée aux fermes familiales indépendantes.

«Aujourd’hui 9 familles se partagent des centaines millions de subventions dans le porc!»

On l’a souvent écrit dans les colonnes de La Vie agricole depuis plus de 20 ans et cela nous a créé des ”ennemis” à l’AQINAC ( Association québécoise des industries de nutrition animale et céréalières ) et parmi les grandes familles intégratrices, mais saviez-vous que lorsque nous alarmions de la situation les quelques centaines de millions de nos et de vos impôts pour soutenir le porc allaient à 25 familles: «Aujourd’hui c’est 9 familles», nous dit Cécilien Berthiaume.

Où est la transparence?

Que le gouvernement veuille sauver des dizaines de milliers d’emplois est peut-être noble, mais s’il ne change pas les règles du jeu c’est écrit dans le ciel qu’il va piocher longtemps dans les poches des Québécois pour sauver l’industrie du porc. Pourquoi le gouvernement ne demande-t-il pas la transparence ?  «Quand les Américains ont sauvé les banques en 2008, la transparence a été exigée pourquoi est-ce si difficile au Québec ?», nous ont confié des acteurs sur le terrain qui s’interrogent de ce silence profond du monde agricole face à une crise gigantesque qui se dessine!

Tentative de suicide et lettre anonyme : la réalité du secteur porcin!

Sur le terrain les producteurs s’affolent. Il y a 15 jours La Vie agricole rencontrait Jean-Paul Messier à Roxton Pond qui cherche à se retirer de la production et qui attendait en vain un retour quant à la gestion du programme de retrait; Cette semaine ce sont des producteurs qui nous envoient une lettre anonyme pour nous implorer de les aider à sortir de ce marasme et de faire la lumière sur les embrouilles.

Désespérés plusieurs fervents de la production indépendante finissent par se tourner vers le porc coop primé par désespoir de cause, d’autres pensent au suicide!

«C’est l’omertà»

Cécilien Berthiaume depuis la Floride nous confie; « Parler à un mur ou à un poteau ou aux Éleveurs de porcs du Québec c’est pareil. Ils sont en toute complicité avec Olymel. Quand ils ne sont pas contrôlés par Olymel, ils le sont par le MAPAQ. Les producteurs manquent d’information. C’est comme en Russie. Les gens n’ont plus de repère et la désinformation fait le travail. C’est l’omertà».

Il y aurait donc une manigance pour s’assurer qu’Olymel, voire Sollio ne tombe pas sur le champ de mines. Mais ce champ de mines, il y a bien des décideurs qui l’ont laissé se propager ?

« On a raté le coche», pense Berthiaume. «Si le grain avait pris la même orientation que le cochon il y a 15 ans en laissant la fédération s’occupait de leurs ventes, ils auraient le même problème avec Sollio qui contrôlerait 80 % du marché».

Un porc en Ontario s’achète quasi 30 dollars de plus qu’au Québec, certaines sources nous disent que l’écart aux États-Unis peut aller jusqu’à 100 $ ! Et selon ce que certains nous disent sur le terrain le gouvernement demande à ce que les porcs soient orientés à Olymel pour sauver des emplois ! Voilà de quoi décourager tout producteur qui ne peut que se sentir menotté. Cécilien Berthiaume nous dit même que dans le contrôle de l’information, on en serait rendu à ne plus diffuser l’information sur les prix dans le bulletin Écho-Porc ! Est-ce pour mieux cacher les choses ou pour ne pas nuire au moral déjà anéanti des quelques producteurs de porcs indépendants restants?

Quel héritage restera-t-il après Lamontagne ?

Les dés sont joués selon Cécilien Berthiaume, «la Financière agricole elle-même sait tout ça, le gouvernement sait tout ça. On dirait que la Financière cache la dette juste pour aider La Coop fédérée»

Ça ressemble à une belle fuite en avant qui coûte cher aujourd’hui, mais qui risque de coûter beaucoup plus cher demain. Il va falloir une véritable prise de conscience. Il est loin d’être certain que ce soit l’héritage que le ministre Lamontagne envisageait de laisser lorsqu’il quittera le MAPAQ.

Oui, il faut possiblement sauver Sollio qui est une institution dans le monde agricole et qui a des interrelations avec nombre d’acteurs dans le milieu qui souffriraient de son effondrement, mais des fois il est plus facile de couper la branche avant qu’elle ne devienne tronc nous assurent certains acteurs inquiets de la situation !

 

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