En grandes cultures comme dans le porc, les conditions sont de plus en plus difficiles.

Gilles Laplante est un producteur de Saint-Valérien-de-Milton. Il s’est investi corps et âmes sur sa terre depuis des décennies, mais commence à douter du soutien que la société souhaite donner aujourd’hui aux producteurs agricoles. Quand il est question des fossés qui entourent les champs, il souligne que les normes sont de plus en plus strictes et souvent inefficaces à ses yeux. Dans le secteur du porc qu’il a bien connu, les dés sont joués et rien de très positif ne s’annonce selon lui. Il s’est entretenu avec La Vie agricole.

La guerre des fossés

Si l’on en croit les écrits sur le site du MAPAQ «Les fossés sont souvent les mal-aimés du territoire agricole».

Pour le MAPAQ, sur le plan environnemental, c’est une bonne stratégie de maximiser l’efficacité des fossés végétalisés pour filtrer l’eau de ruissellement et sur le plan agricole, «l’entretien des fossés peut contribuer à un drainage efficace», et permet d’espacer les travaux de nettoyage des cours d’eau et des fossés.

Ce n’est pas nécessairement l’avis du producteur de Saint-Valérien-de-Milton, Gilles Laplante, à qui La Vie agricole a parlé. Si comme la plupart des producteurs avec lesquels on échange,  M. Laplante est soucieux de l’environnement, il juge par ailleurs que le transfert des responsabilités de la municipalité vers la MRC est un non-sens. Il regrette que le maire actuel soit issu de la ville et ne comprenne pas vraiment les enjeux du monde agricole. « Le maire vient de la ville et il n’a rien à faire de la réalité des producteurs agricoles», dit M. Laplante. « En donnant la responsabilité à la MRC, au final ça coûte toujours plus cher au producteur. La principale job de la MRC est de nous mettre des amendes si on sème trop proche. On est surveillé en permanence.», dit-il.

Des producteurs perçus comme des capitalistes!

Ghislain Poisson, agronome, de la Direction régionale de la Montérégie-Est du MAPAQ écrit sur le site du ministère concernant les fossés que «la tendance des dernières années consiste plutôt à les faire disparaître pour accroître les superficies consacrées aux cultures», pour plus de revenus. Les producteurs ne seraient donc que des capitalistes sans scrupules pour l’environnement ? M. Laplante a une autre lecture de la situation. Et si les fossés non entretenus étaient la cause des inondations vécues?

Les fossés naturalisés responsables des inondations ?

Propriétaire d’une ferme de 200 hectares M. Laplante pense en connaître un peu plus même que certains ingénieurs qui viennent faire la leçon dans les champs. Si l’ambition d’accentuer la naturalisation des fossés est décrétée pour un plus grand respect de l’écologie M. Laplante se demande alors pourquoi on subit plus d’inondations depuis que la norme est de naturaliser de plus en plus les fossés au Québec ?

Il y a une volonté claire selon lui de faire moins d’intervention, il rappelle qu’on était capable autrefois de nettoyer 60 kms de fossés  par an dans la région de Saint-Hyacinthe et maintenant à peine 20.

Le MAPAQ en faveur des fossés naturalisés pour contrer les pesticides.

Le MAPAQ incite de son côté les MRC à aller dans la voie dans laquelle elles s’engagent depuis quelques années. Le ministère rappelle sur son site  que des fossés agricoles en bonne santé «peuvent contribuer à une bonne productivité des cultures à proximité, tout en réduisant les apports de sédiments vers les cours d’eau, en préservant la biodiversité du milieu agricole et en limitant l’érosion des berges». Des fossés végétalisés sont utiles précise le MAPAQ pour le captage des pesticides, de l’azote et du phosphore dissous durant la saison de croissance.

C’est une lecture de la situation même si une toute récente étude européenne démontre que la présence de pesticides dans les cours d’eau ne vient pas en majorité du milieu agricole, mais des milieux urbains via l’utilisation excessive de détergents en ville.

Les grosses compagnies épargnées

Si les producteurs sont surveillés, il semble que les actions des grosses compagnies le soient moins.

«Avant, on avait l’abattoir d’Olymel par ici, il jetait ses déchets à la rivière et ses produits toxiques, mais on leur disait rien. C’est l’avantage d’être une grosse compagnie et d’avoir du pouvoir sur les ministères.».

Dans le village le ponceau est affaissé et c’est selon M. Laplante ça qui a créé l’inondation au village qui a reçu 160 mm de pluie cet été.

«Le ponceau d’environ un kilomètre est usé, mais maintenant ça prend une étude pour tout, un plan d’ ingénieur. Nous, sur nos fermes et j’en ai parlé avec plusieurs producteurs, on a tous le même problème avec la MRC. Certains sont même en cours contre elle. Ils ont nettoyé leurs fossés par eux-mêmes et même quand on leur dit que leur travail c’est correct il faut tout recommencer avec un plan d’ingénieur.»

Le porc derrière lui

Gilles Laplante était producteur de porcs à forfait et producteur de grandes cultures. Il a abandonné la production des porcs il y a un an maintenant.  Autrefois à forfait pour F.Ménard, il s’est retrouvé géré par Olymel après la transaction qui a intégré le groupe privé dans la coopérative. « Depuis Olymel, c’était devenu trop compliqué, ils baissent de 10 % le nombre de cochons et baissent les contrats de 10 % et ils demandent toujours plus d’investissements. J’en ai fini avec les cochons et ça ne va pas plus mal.»

 

 

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