Vous avez enfin trouvé la perle rare pour vous aider sur la ferme : François. Il a lui-même grandi sur une ferme et le milieu agricole n’a pas de secret pour lui. Il habite la Gaspésie, mais a accepté de rouler sa bosse jusqu’à Saint-Nicéphore, histoire de changer d’air. Pour faciliter les choses, vous lui louez une résidence située à proximité de la ferme et, pour officialiser le tout, vous signez un contrat de travail, de même qu’un bail pour la location de la maison.
Malheureusement, une fois arrivé sur les lieux, François n’offre pas la prestation de travail nécessaire et après plusieurs avertissements, vous n’avez d’autres choix que de mettre fin à son contrat de travail.
Une question se pose alors, qu’advient-il du bail?? Pouvez-vous y mettre fin et dans l’affirmative, dans quel délai?? Au surplus, si François refuse de quitter le logement, vers quel tribunal devrez-vous vous tourner pour obtenir une ordonnance d’expulsion??
Pour obtenir réponse à ces questions, vous devez, en tout premier lieu, établir lequel des contrats est l’accessoire de l’autre. En d’autres mots, lequel est le contrat principal, à savoir l’origine principale des droits et obligations des parties.
Dans le présent cas de figure, il y a eu bail de location CAR il y a eu contrat de travail puisque vous n’auriez jamais loué la maison à François, n’eût été son embauche. Nous pouvons donc conclure que le bail est accessoire au contrat de travail, qui lui est le contrat principal.
Ainsi, à moins que le contrat de travail ne prévoie autre chose vous pourrez, conformément à l’article 1976 du Code civil du Québec, résilier le bail, en donnant à François un préavis d’un mois. Il en est de même pour François qui pourra vous donner un préavis d’un mois lorsque son contrat de travail aura pris fin. Cela constitue une exception prévue au principe du droit au maintien dans les lieux dont bénéfice tout locataire.
Maintenant, qu’arrivera-t-il si François refuse de quitter la résidence à l’expiration du délai d’un mois?? À qui devrez-vous vous adresser pour le forcer à quitter, le Tribunal administratif du logement ou un tribunal de droit commun??
À cet effet, les tribunaux ont statué que le Tribunal administratif du logement n’a pas compétence lorsqu’il s’agit de trancher un litige concernant un bail qui est accessoire à un contrat de travail. Donc, lorsque le contrat de travail est le contrat principal, c’est la Cour du Québec ou la Cour supérieure qui sera compétente dépendamment de la valeur de l’objet en litige.
Ceci étant établi, un avertissement s’impose. Sachez le caractère « accessoire » du bail sera perdu si vous permettez à François de continuer à occuper la résidence après la fin de son contrat de travail. Ce faisant, ce sera le Tribunal administratif du logement du logement qui aura compétence pour trancher un litige et, surtout, François pourra bénéficier du droit au maintien dans les lieux. Vous ne pourrez donc plus utiliser l’exception prévue à l’article 1976 du Code civil du Québec pour résilier le bail moyennant un préavis d’un mois. Ainsi, pour éviter toute confusion quant au caractère accessoire du bail, nous vous recommandons d’agir rapidement.
Par ailleurs, vous avez des interrogations en lien avec un bail relié à un contrat de travail, nous vous recommandons de consulter un conseiller juridique afin de vous informer rapidement sur vos droits et, le cas échéant, sur les recours à votre portée.
Écrit en collaboration avec Mme Annie Gauthier-Allard