Comme cela fut déjà mentionné dans notre chronique du mois de novembre 2023, les régions rurales comportent de nombreux terrains sur lesquels existe une servitude, que celle-ci soit légale ou conventionnelle. En résumé, la servitude fait naître une obligation pour un propriétaire (le propriétaire du fonds servant) de supporter de la part du propriétaire d’un autre immeuble (le fond dominant) l’exercice de certains actes d’usage ou à s’abstenir lui-même d’exercer certains droits inhérents à sa propriété. En pratique, dans le domaine agricole, la servitude prend souvent la forme d’un droit de passage, c’est-à-dire le droit d’un propriétaire de passer sur un terrain appartenant à quelqu’un d’autre, généralement afin d’accéder à son propre terrain de façon sécuritaire. Cela étant dit, il existe certains contextes par lesquels une servitude s’éteindra, à savoir où elle prendra fin.
Effectivement, le Code civil du Québec prévoit cinq situations menant à l’extinction d’une servitude. Le premier moyen est la confusion. On fait référence à la confusion lorsque le propriétaire du fonds servant devient également propriétaire du fonds dominant, ou vice-versa. En effet, une servitude ne peut exister qu’entre des immeubles (dans cet exemple, des terrains) détenus par des propriétaires distincts. Dès lors que la même personne devient propriétaire des deux immeubles, la servitude disparaît.
Le second moyen d’éteindre une servitude est la renonciation expresse du propriétaire du fonds dominant. En d’autres mots, la personne qui bénéficie de la servitude peut, volontairement, « se défaire » des droits dont il peut user sur le fonds servant. Toutefois, afin qu’il y ait véritablement extinction de la servitude, la renonciation doit être expresse, c’est-à-dire qu’elle ne peut être présumée ou encore implicite. Elle doit être claire et, idéalement, écrite.
Le troisième moyen est l’arrivée du terme pour lequel la servitude a été constituée. Dans les faits, si une servitude est établie par contrat, il est possible pour les parties de prévoir une date par laquelle la servitude prendra fin, soit le terme. Ainsi, lorsque la servitude viendra à échéance par l’effet du contrat, la servitude s’éteindra automatiquement.
Le quatrième moyen est le rachat. Bien que cette situation soit plus rare, il arrive que le propriétaire du fonds servant puisse racheter la servitude, advenant qu’il existe une grande disproportion entre l’utilité pour le fonds dominant avec les inconvénients existants pour le fonds servant. Si les propriétaires ne s’entendent pas à ce sujet, il est possible d’être entendu par le tribunal afin que ce dernier puisse octroyer le droit de rachat, dans certaines conditions exceptionnelles.
Le cinquième et dernier moyen est la prescription extinctive, soit le non-usage pendant 10 ans. Dans le cas précis de la servitude de passage, cela signifie que la servitude prendra fin dès lors que le propriétaire du fonds dominant n’aura pas fait usage de la servitude (n’a donc pas usé du droit de passage) pendant un minimum de 10 années consécutives.
En conclusion, si vous êtes propriétaire d’un terrain bénéficiant d’une servitude, ou encore d’un terrain grevé par une servitude sachez que celle-ci peut s’éteindre dans certaines circonstances. Dans un tel cas, nous vous recommandons de consulter un conseiller juridique afin de vous aiguiller et de vous accompagner dans tous les questionnements découlant de la servitude.
Rédigé en collaboration avec Mme Laury-Ann Bernier